Emploi

Recherche d’emploi : évitez de vous auto-censurer !

Alors que le taux de chômage baisse et de nombreux secteurs ou métiers peinent à attirer les nouvelles recrues, l’école de commerce EM Normandie a étudié les raisons qui poussent des candidats à ne pas postuler à des offres auxquelles leurs profils correspondent pourtant. Explications de Jean Pralong, qui dirige la chaire « Compétences, employabilité et décisions RH » au sein de l’établissement.

L’école de commerce EM Normandie a publié, fin février, une enquête sur l’auto-élimination des candidats, qui pourrait bien être une cause méconnue des tensions sur le marché de l’emploi. Elle cherche à comprendre pourquoi certains répondent à une offre tandis qu’à compétences strictement égales, d’autres « n’osent pas proposer leurs services, alors même qu’ils pourraient être recrutés. »

Elle porte sur un panel de 165 comptables généralistes à la recherche d’un emploi, avec des compétences et des degrés d’ancienneté équivalents, mais aux carrières très différentes. Face à des annonces sélectionnées pour correspondre tant à leur profil qu’à leur localisation, seuls 46 % des participants à l’étude ont choisi de postuler. Donc plus de la moitié se sont autoéliminés d’office !

La difficulté de candidater dans le flou

Ce faible taux de réponse ne correspond pas à la perception que l’on peut avoir d’un point de vue extérieur, souligne Jean Pralong, qui dirige la chaire « Compétences, employabilité et décisions RH » de l’EM Normandie : « Pôle emploi, les recruteurs et de nombreux acteurs en lien avec le monde du travail incitent les candidats à postuler au maximum aux offres d’emploi pour avoir plus de chances d’être recrutés. Ce raisonnement classique est statistiquement plutôt vrai. Comme on dit, 100 % des gagnants ont tenté leur chance ! » Mais la réalité est tout autre si l’on adopte la vision des candidats eux-mêmes, nuance le professeur en RH digitales et gestion des carrières : « Si l’on se met dans leur peau, le recrutement s’apparente à un jeu concours dont on ne connaît pas les règles, ni les concurrents en lice, ni l’arbitre. Et même le poste à la clé n’est pas toujours très clairement décrit par l’annonce… Donc les candidats avancent à l’aveuglette, ils sont dans le flou et estiment souvent que la probabilité pour rencontrer le succès est faible puisqu’il n’y aura qu’un seul vainqueur. »

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Face au contexte incertain de cette compétition pour un poste, le retour sur investissement s’avère aléatoire, or l’étude rappelle que cet investissement inclut une composante affective, « particulièrement saillante pour expliquer l’auto-élimination des candidats qui supposent ne pas disposer des trajectoires linéaires attractives. Il est aisé de comprendre le caractère délétère de ce processus : les candidats les moins attractifs se dissuadent de postuler et raréfient leur implication dans les compétitions de recrutement. Ils ne peuvent que limiter leurs chances d’accès à des emplois ; mais ils s’offrent d’autant moins l’opportunité de se rassurer, de peaufiner leurs documents de candidature ou d’apprendre à gérer les aléas liés au recrutement. »

Surmonter le syndrome de l’imposteur

Ceux qui pensent que leur profil est moins séduisant ont des « parcours hachés, incluant des périodes de chômage, des contrats précaires et plusieurs employeurs. Ils postulent faiblement. Ce ne sont ni l’affinité avec le poste, ni l’affinité avec l’entreprise qui déclenchent l’acte de postuler : c’est l’estimation de bonnes chances de succès (…) Par expérience ou par l’anticipation de difficultés, ces individus se représentent le processus de sélection comme la principale épreuve qu’ils vont devoir surmonter pour accéder à l’emploi. Mais ils évitent de se confronter à trop de refus, et ne postulent que lorsque les chances de succès sont fortes. » Malgré leurs compétences, ces talents s’auto-éliminent en anticipant les comportements sélectifs des recruteurs, regrette Jean Pralong : « Ils craignent que leur parcours ne soit pas reconnu. Ils vivent un ascenseur émotionnel et sont souvent échaudés par les réponses négatives à répétition. »

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Et l’enquête de préciser que pour postuler, les candidats doivent aussi faire preuve d’un investissement en temps : « répondre à une annonce, même via un outil digital qui peut proposer de postuler en un clic, demande de peaufiner et d’adapter ses documents de candidature. Un CV a plus de chances d’être accepté s’il est remanié en fonction des besoins du poste. »

En outre, Jean Pralong insiste sur le fait que les talents n’ont pas toujours une vision objective d’eux-mêmes et devraient tenter davantage leur chance. « D’autant plus qu’actuellement, dans beaucoup de secteurs et de métiers, c’est un marché de candidats qui domine, donc favorable à ceux cherchant un emploi puisque beaucoup de postes ne parviennent pas à être pourvus. » Il ne faut donc pas hésiter à miser sur ce contexte propice, qui peut changer la donne… même quand on ne coche pas toutes les cases !

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