En quoi consiste-t-il ?
Il s’agit d’un congé entraînant la suspension du contrat de travail. Il s’étale de six à onze mois selon le code du travail. « Mais la durée, comme certaines autres conditions de ce dispositif, peut varier car il existe une grande liberté d’interprétation pour les accords collectifs d’entreprise, les accords de branche et les conventions collectives, prévient Me Nadia Belaïd, avocate au Barreau de Paris intervenant en droit du travail. Ce qui est certain, c’est qu’il n’y a pas besoin de donner un motif ou une raison à ce congé. En principe, on ne doit pas travailler dans une entreprise concurrente, mais, selon la jurisprudence, si cela n’entraîne pas d’actes de concurrence déloyale, il n’y a pas d’objection à cela. » Être payé pour une nouvelle activité permet de ne pas se retrouver sans revenu, car pendant le congé sabbatique, l’entreprise que l’on a temporairement quittée ne rémunère pas son salarié absent. De plus, ce dernier n’acquiert ni ancienneté, ni droit à congés payés. En revanche, il peut poser ceux qu’il avait accumulés, ou bien, si l’employeur donne son accord, utiliser son compte épargne-temps.

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« C’est un droit intéressant pour les salariés, et peut-être n’en ont-ils pas tellement conscience, observe Me Nadia Belaïd. Or, cela peut permettre de tester son projet de reconversion tout en gardant la sécurité de son emploi originel. Ou de s’occuper d’un proche, de faire un long voyage, etc. » Mais aussi de créer sa propre société, comme ce fut le cas pour Cécile Michel qui travaillait à la direction des ressources humaines d’un grand groupe de transport et voulait se lancer dans la menuiserie : « C’est un super dispositif que j’ai utilisé à partir de fin 2017, pendant onze mois. En effet, je ne voulais pas prendre un congé sans solde qui ne me garantissait pas de retrouver salaire et poste équivalents en cas d’échec. Ma demande a été acceptée, car j’avais terminé un projet et mon absence ne gênait donc ni l’organisation ni les équipes. Refuser, et donc m’obliger à rester, aurait entraîné une démotivation de ma part qui n’était pas dans l’intérêt de mon employeur… Attention tout de même, il faut avoir les moyens financiers ! Soit en ayant économisé, soit en trouvant un autre emploi rémunéré pendant le congé sabbatique.«
À qui s’adresse-t-il ?
Il faut remplir plusieurs conditions : avoir effectué six années d’activité professionnelle dans sa carrière, pas forcément chez le même employeur, et avoir une ancienneté d’au moins 36 mois, consécutifs ou non, dans l’entreprise à qui l’on demande le congé sabbatique. Néanmoins, une convention collective ou un accord d’entreprise peuvent prévoir des règles différentes. Ainsi, chez Morning, spécialiste des espaces de travail, il n’y a pas d’années de présence minimales exigées, explique Marie Barbier, la DRH : « En effet, nos équipes sont assez jeunes. Les demandes sont souvent intervenues après deux ans d’ancienneté. Nous préférons donner notre accord et avoir un salarié qui s’épanouit plutôt qu’un collaborateur frustré par un refus, pas motivé, voire qui part de l’entreprise alors que c’était un bon élément. Aujourd’hui, on est dans une société de l’instantanéité et comme les gens ont envie de vivre différentes expériences, le congé sabbatique est pratique pour cela. En dix ans d’existence, Morning a connu une petite dizaine de congés sabbatiques, sur 280 employés actuellement : un salarié qui a aidé sa femme à vendre des fleurs sur les marchés ou bien il y a eu des projets de création d’entreprise et, surtout, de longs voyages. En général, c’était pour six mois, personne n’ayant opté pour le maximum de presqu’un an.«
De plus, il existe, en principe, un délai de carence entre deux congés sabbatiques, ou bien avec un congé pour création ou reprise d’entreprise, voire avec un projet de transition professionnelle d’une durée d’au moins 6 mois.
Le congé sabbatique peut-il être refusé ?
Dans les sociétés de moins de 300 salariés, il peut être reporté, voire refusé, si l’employeur estime, après avis du comité social et économique, que le départ en congé aura des conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise. Dans les structures plus grandes, cela ne peut pas être refusé, seulement différé en raison, notamment, d’un manque d’effectif.
Que se passe-t-il après ?
À noter que l’employeur n’a pas l’obligation de réemployer le salarié avant la fin de la période prévue initialement. Après un congé sabbatique, le salarié retrouve son emploi précédent, ou un emploi similaire dans l’entreprise. Il perçoit une rémunération au moins équivalente à celle qu’il gagnait au moment du départ. Et il a le droit de bénéficier d’un entretien avec son employeur consacré à ses perspectives d’évolution professionnelle.