Entreprendre

Tony Parker : « Les moments difficiles permettent la naissance de grands moments dans le futur »

En plein cœur de Paris, à deux pas des épreuves olympiques, la légende du basket nous a accordé une interview exclusive. Ce mercredi 31 juillet, il nous a livré ses bons conseils pour entreprendre de nouveaux projets, surmonter les moments difficiles, bien s'entourer, et encore se rassembler autour de projets bénéfiques pour la société.

« Il n’est pas nécessaire d’éteindre la lumière de l’autre pour que brille la nôtre », disait Gandhi. C’est un principe que Tony Parker incarne à merveille. Il sait comment faire briller ses compétences sportives et entrepreneuriales, tout en faisant briller celles des autres athlètes. Objectif ? Les accompagner vers leur nouveau projet professionnel afin de construire un écosystème d’entrepreneurs désireux de développer des projets à impact positif pour la société.

Comment anticiper ses futurs projets professionnels lorsqu’on est sportif de haut niveau ?

Tony Parker (TP) – Il faut trouver une nouvelle passion. Lorsqu’un sportif a fait la même chose pendant 20 ou 30 ans, dans le meilleur des cas, prendre sa retraite peut faire peur. C’est même vertigineux parfois. Certains sportifs sont proches de la dépression, car ils se demandent ce qu’ils vont pouvoir faire ensuite. Le plus important, c’est vraiment de trouver une autre passion pour ne pas avoir l’impression de travailler. Ensuite, il faut se lancer à fond dans ce nouveau projet, ne pas compter ses heures. Il faut également savoir être humble, car c’est un nouveau départ, il faut tout reprendre à zéro. Quand on arrive dans le monde de l’entreprise, les équipes oublient ou se fichent de qui nous sommes, de ce que nous avons fait avant dans le milieu sportif. Ils veulent savoir ce que nous allons apporter au monde du business. C’est difficile pour certains athlètes, car parfois ils ont gagné beaucoup d’argent en travaillant seulement quelques heures par jour. Là, il faut se lever à 6 heures, finir à 22 heures. C’est beaucoup de travail !

Vous parlez de dépression… Que pensez-vous de la libération de la parole autour de la santé mentale ?

TP – Je trouve que c’est bien d’en parler. C’était très, très tabou avant. Dans le sport, les gens nous prenaient pour des machines. Nous n’avions pas le droit d’avoir de sentiments. Le fait que des athlètes en parlent, comme Simone Biles, j’ai vu son documentaire il y a quelques jours sur Netflix, je trouve ça très bien. Cela permet de faire comprendre aux gens que nous sommes des athlètes en journée, certes, mais que le soir, quand nous rentrons chez nous, nous redevenons des humains avec des émotions, des moments de vulnérabilité. Il faut accepter que nous pouvons perdre nos moyens par moment, puis les retrouver ensuite. Il peut y avoir des hauts et des bas, comme dans une carrière d’entrepreneur.

Comment transformer les moments difficiles en force ?

TP – Les moments difficiles permettent d’aller puiser dans nos ressources, de voir comment nous réagissons face à certains évènements. Ils nous montrent notre faculté à gérer les obstacles, à voir si nous sommes capables de réussir ou pas. Les mauvais moments nous permettent d’apprendre beaucoup plus que les bons moments. Pas seulement pour son activité professionnelle, mais aussi sur les personnes qui nous entourent. C’est là qu’on voit qui sont les vrais amis, qui est là pour nous. Les moments difficiles permettent la naissance de grands moments dans le futur. C’est donc important de bien les gérer et de ne pas abandonner. Cela m’est arrivé de faire de mauvais investissements. Mais j’ai appris de mes erreurs et identifié comment faire mieux la prochaine fois. Il faut savoir rester positif, car même si nous ne comprenons pas tout de suite pourquoi c’est arrivé, nous le comprendrons mieux plus tard. Quand de mauvaises choses arrivent, je me dis que j’en tirerai forcément quelque chose de positif tôt ou tard.

Qu’est-ce qui est positif aujourd’hui dans votre carrière ?

TP – C’est de bâtir au quotidien. Je suis animé par la transmission. Je veux avoir une bonne influence sur les autres, les inspirer. J’ai envie de donner à la prochaine génération, notamment à travers des projets qui ont de l’impact sur la société, l’environnement, et la jeunesse. J’ai commencé avec des clubs de basket masculin et féminin. J’ai contribué, par exemple, à tirer le sport féminin vers le haut en augmentant les salaires des joueuses, en leur donnant de la visibilité. J’ai fait plein de choses qui n’existaient pas avant.

Comment tissez-vous des liens solides avec les dirigeants ?

TP – Les chefs d’entreprise apprécient nos profils, car le sport nous inculque de bonnes valeurs, une bonne éthique de travail, une grande discipline et de l’endurance. Nous avons la capacité d’encaisser beaucoup d’heures de travail. J’ai commencé très tôt à tisser des liens avec les dirigeants. J’ai rencontré Magic Johnson (ancien joueur de basket américain, ndlr) à seulement 24 ans. C’était ma référence sur comment réussir l’après-carrière sportive. Il m’avait conseillé de construire mon réseau professionnel pendant mon activité sportive parce qu’à ce moment-là nous faisons beaucoup de rencontres, tout le monde veut passer du temps avec nous. Il ne faut pas attendre de créer un beau carnet d’adresses au moment de la retraite. C’est presque trop tard. Les gens nous oublient très vite. Il faut donc créer du lien, car on ne peut rien faire seul. D’une manière générale, c’est mieux d’être entouré, de fédérer les autres. Au fil des années, des liens forts se tissent, en passant du temps avec les uns et les autres lors de déjeuners, de soirées. J’ai pris le temps de les écouter. Créer un lien de confiance prend du temps.

En ce sens, vous tenez à participer à la construction d’un écosystème d’anciens athlètes-entrepreneurs ?

TP – Exactement ! Je veux créer un écosystème à impact durable. C’est pour ça que j’ai pris part au programme « Athlete365 Business Accelerator » du CIO (Comité international olympique), dont Alibaba (plateforme internationale de e-commerce, ndlr) est partenaire. C’est important ce qu’ils mettent en place pour les sportifs de demain, que ce soit en termes de formations ou de financements. Quand je suis allé rencontrer les athlètes au village olympique hier (mardi 30 juillet 2024, ndlr), ils me parlaient davantage de mon business que de ma carrière sportive. C’est très positif ! Cela signifie qu’ils ont le réflexe de se projeter, de réfléchir à ce qu’ils vont faire à l’avenir.

À la tête d’Infinity Nine Group, Tony Parker entend ainsi consolider son activité : « Nous avons pas mal investi dans différentes entreprises, donc maintenant il faut garder ces projets viables sur le long terme. »

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