Peut-on arriver en retard au travail ou s’absenter le jour de la rentrée scolaire ? C’est la question que se posent de nombreux parents tous les ans, début septembre. Car il faut savoir que si nombre d’entreprises font preuve de souplesse, le risque est grand pour le salarié s’il ne respecte pas quelques règles.
Le mardi 1er septembre 2020, les enfants retourneront sur les bancs de l’école. Les plus jeunes, âgés de 3 ans, y pénétreront pour la première fois. Une rentrée scolaire particulière, qui suivra une année 2019-2020 fortement perturbée par la pandémie de Covid-19 et les mesures de confinement. Nombre de parents devraient dans ce contexte retarder leur arrivée au travail de quelques heures, afin d’accompagner leur progéniture.
Mais est-il possible d’arriver en retard au travail pour une telle raison ? Ou encore de prendre une journée de congés pour l’occasion ? Si les employeurs font souvent preuve de compréhension et de flexibilité, le risque peut être important pour le salarié qui décide de s’absenter sans suivre quelques règles au préalable.
Le Code du travail ne prévoit rien pour la rentrée
Que dit la loi en matière d’absence à la rentrée ? “Absolument rien ! Le législateur ne parle jamais de la rentrée scolaire des enfants des salariés. Rien n’est prévu dans la loi concernant cela”, remarque Me Alexandre Frech, avocat au Barreau de Paris. L’article L3142-1 du Code du travail relatif aux “congés sur justification d’événements familiaux” ne porte ainsi que sur les congés pouvant être pris en cas de mariage, de Pacs, de naissance d’un enfant, d’adoption ou de décès d’un parent.
Certaines conventions collectives prévoient des aménagements
Le salarié désirant accompagner son enfant devra donc se tourner vers la convention collective applicable dans son entreprise. En effet, certaines autorisent l’absence d’un collaborateur, sous réserve, généralement, de satisfaire certaines conditions (âge de l’enfant, niveau de scolarisation). D’autres prévoient des rémunérations, ou encore des “aménagements horaires” (en échange d’un “rattrapage” des heures non effectuées).
La convention collective nationale de la coiffure prévoit par exemple que les salariés (pères et mères) ayant des enfants “scolarisés de 13 ans au plus” bénéficieront d’une autorisation d’absence de 3 heures, sans réduction de la rémunération ; et celle des entreprises de propreté prévoit une journée entière (rémunérée) pour les parents, pour la première rentrée à l’école de leur enfant. La plupart de ces conventions collectives précisent toutefois que le salarié devra prévenir sa hiérarchie une semaine à l’avance, et que son absence ne devra pas “désorganiser le service”.
En l’absence de textes, c’est l’employeur qui décide
Toutefois, un grand nombre de conventions collectives n’ont pas de clauses spécifiques relatives à la rentrée des classes. Dans ce cas, c’est l’employeur qui décide. Le salarié devra ainsi lui demander l’autorisation de s’absenter ou d’arriver en retard. Sans quoi il pourrait être sanctionné.
“Vous devez impérativement demander l’accord de l’employeur ; afin d’arriver en retard, ou de prendre une demi-journée de congé / RTT. Envoyer un e-mail la veille pour prévenir de votre retard ne suffira pas ! En faisant cela, vous vous mettriez en faute contractuelle, et l’entreprise pourrait prendre une mesure disciplinaire à votre égard, qui pourrait aller, en cas de retards répétitifs dans l’année, jusqu’au licenciement”, prévient Me Frech.
L’avocat recommande en outre de ne jamais faire de demande orale, et de toujours passer par l’écrit. “On ne peut pas simplement passer la tête par l’embrasure de la porte pour prévenir son supérieur. Écrire un e-mail permettra de vous protéger en cas de contentieux”, précise-t-il.
La demande de prise de congé doit être, selon la loi, effectuée au moins un mois à l’avance. “Pour un retard, mieux vaut également le faire en amont, a minima une semaine avant”, indique Alexandre Frech. “En réalité, le principal reste de discuter en bonne intelligence avec son employeur. Car la plupart se montrent conciliants et compréhensifs. Quand ils sont sollicités suffisamment en avance, avec les formes”, ajoute-t-il.
Les télétravailleurs ne dérogent pas à la règle
Quid, enfin, du télétravail, généralisé avec la pandémie ? Est-il possible de télétravailler en retard ? “Les textes qui encadrent le télétravail (avenants au contrat de travail, accords d’entreprise, conventions collectives, chartes) peuvent prévoir des heures obligatoires de présence devant l’écran. Ou durant lesquelles vous devrez être impérativement joignable. Si l’on essaie de vous joindre et que vous accompagnez votre enfant à l’école à ce moment-là, l’employeur peut vous en tenir rigueur… si vous ne l’avez pas informé”, indique l’avocat. Dans le cas du travail à distance, mieux vaut également informer son supérieur le plus en amont possible, et obtenir son accord.
Si le télétravail a été mis en place sans aucun encadrement, comme c’est encore le cas dans de nombreuses entreprises ayant mis en place ce dispositif suite à la pandémie de Covid-19, ce sont les horaires de travail spécifiés dans le contrat de travail qui s’appliquent. Et là encore, tout reposera sur l’accord de l’employeur. “Il peut choisir dans ce cas, d’accepter ou non, de vous rémunérer ou non, et de vous faire rattraper votre absence ou non”, conclut Me Frech.
À noter qu’en vertu de son pouvoir de direction et d’organisation de l’entreprise, l’employeur n’est nullement obligé d’accepter votre demande. Mais il doit veiller à ne pas créer d’inégalité de traitement avec ses salariés. Si à poste équivalent, l’un d’entre eux a par exemple obtenu l’autorisation d’arriver en retard, et que son collègue essuie un refus, sans justification objective, un potentiel contentieux pourra se résoudre en dommages et intérêts devant le conseil de prud’hommes.