Après un accès durci en novembre, la réforme de l’Assurance chômage devait entrer dans sa dernière phase début avril, avec un nouveau mode de calcul du montant de l’allocation chômage. Mais face au coronavirus et à son impact économique, Muriel Pénicaud a finalement reporté la mesure à septembre.
Article du 12 mars 2020, mis à jour le 16 après le report de la mesure par Muriel Pénicaud.
Initialement, le deuxième volet de la réforme de l’Assurance chômage devait entrer en vigueur le 1er avril. Mais face au coronavirus, les syndicats s’inquiétaient la semaine dernière que l’épidémie ne débouche sur une crise économique impactant les travailleurs précaires. Ils demandaient ainsi au gouvernement de reporter le nouveau mode de calcul du montant de l’allocation chômage.
“En de telles circonstances, les emplois précaires, CDD de courte durée, intérimaires, sont la première variable d’ajustement. C’est bien en période de crise que le rôle d’amortisseur social de l’Assurance chômage doit être réaffirmé”, notait la CFDT dans un communiqué. De son côté, FO écrivait que “la situation économique créée par l’épidémie risque de conduire à ce qu’un plus grand nombre de salariés se retrouvent en situation de demandeurs d’emplois et donc de subir les conséquences restrictives de ces mesures : non-droit à indemnisation ou réduction du montant de l’allocation.”
Alors que ce week-end, le gouvernement a annoncé successivement la fermeture des écoles, puis des restaurants et des bars (qui fonctionnent avec un grand nombre de contrats courts), Muriel Pénicaud a décidé, après discussion avec les partenaires sociaux, du report des nouvelles règles de calcul au 1er septembre 2020.
“La réforme de l’assurance chômage a été conçue dans un contexte qui n’a rien à voir avec aujourd’hui, il nous fallait faire preuve de pragmatisme”, a-t-elle expliqué sur BFM TV, ce lundi 16 mars. Un décret devrait être publié dans les 48 heures au Journal officiel.
Un nouveau mode de calcul du montant de l’allocation chômage
Pour rappel, en septembre, les règles d’indemnisation du chômage seront ainsi révisées pour que les allocations chômage ne puissent jamais dépasser le montant du salaire net mensuel moyen perçu par le salarié avant la période de chômage, ni être inférieures à 65 % du salaire. Elles seront ainsi calculées sur le revenu mensuel moyen du travail, et non plus sur les seuls jours travaillés.
Concrètement, pour obtenir le montant des allocations chômage, il fallait jusqu’ici calculer le salaire journalier de référence (SJR), qui s’obtenait en divisant la somme des salaires bruts (primes comprises mais hors indemnités liées à la rupture du contrat) perçus au cours des 12 derniers mois, par nombre de jours travaillés pendant la même période. Dès le 1er avril prochain, le calcul du SJR prendra ainsi en compte tous les jours, y compris les périodes d’inactivité – excepté les périodes de congé maternité, d’accident du travail ou d’arrêt maladie d’une durée supérieure à 15 jours. Pour un même travail, le salaire journalier sera donc désormais identique entre une personne ayant travaillé en continu et une personne ayant alterné contrats courts et inactivité.
Par ailleurs, la période prise en compte pour le calcul du salaire journalier de référence évolue : dès le 1er avril 2020, elle se basera sur les revenus perçus au cours des 24 derniers mois (pour les moins de 53 ans) ou les 36 derniers mois (pour les plus de 53 ans), et non plus 12 mois, comme c’est actuellement le cas. Ces nouvelles règles auront pour effet d’augmenter la durée d’indemnisation des personnes qui ont alterné périodes de contrats courts et périodes sans emploi (elle passera de 12,1 à 17,7 mois)… mais aussi de faire baisser leur allocation mensuelle.
-> À noter que seuls les allocataires ouvrant des droits à compter du 1er septembre 2020 devraient être concernés par la réforme. “Ce nouveau mode de calcul n’impactera pas les salariés qui ont eu un emploi continu dans les 2 ou 3 années précédant la dernière perte d’emploi, par exemple un CDI ou plusieurs CDD sans périodes d’interruption entre les différents contrats. Il est donc dans l’intérêt de tous les salariés, inscrits ou non comme demandeurs d’emploi, de réduire au maximum les périodes d’inactivité entre deux missions ou contrats”, prévient Pôle emploi.
Un “système similaire au chômage partiel” pour les employés à domicile
Muriel Pénicaud a aussi annoncé la mise en place d’un “système similaire au chômage partiel” pour les personnes employées à domicile (assistantes maternelles, femmes de ménage) qui n’ont plus de travail ou ont moins de travail. Les employeurs continueront de les rémunérer à hauteur de 80 % de leur salaire habituel et ils se feront ensuite rembourser.
“Elles toucheront 80 % de leur salaire, l’employeur fera l’avance et on le remboursera par le Cesu”, explique Muriel Pénicaud. Pour les travailleurs indépendants, une décision sera prise dans les jours qui viennent. La perte de leur chiffre d’affaires sera indemnisée “soit par un fonds d’indemnisation, soit par une dérogation aux arrêts maladie”.