Déjà prises en compte par les recruteurs avant la crise, les soft skills sont encore plus recherchées qu’auparavant. Les candidats doivent aussi s’adapter au télétravail, et ce dès l’entretien, qui se fait de plus en plus à distance.
La crise que nous traversons a généré de nombreux changements dans notre quotidien. Et le recrutement n’a pas échappé à ce phénomène. « La crise sanitaire a fortement bouleversé le monde du travail, aussi bien son organisation que les critères de recrutement », juge Adrien Scemama, country manager de talent.com, moteur de recherche d’emploi qui agrège l’intégralité des offres du marché. Il observe en effet que, dans les offres d’emploi, le terme « flexible » est en augmentation de 41 % et « autonome » en progression de 28 % ; quant au « télétravail », il affiche une hausse de 203 %. « Les recruteurs veulent s’assurer que les candidats sont assez matures et autonomes, suffisamment responsables et organisés, pour pouvoir faire face à une situation de travail à distance », précise Julien Frutoso, directeur senior chez Page Personnel.
Les attentes des recruteurs ont donc évolué. Ou plutôt, comme le souligne Romain Giunta, responsable éditorial de Monster, elles se sont « affirmées ». « Les soft skills sont de plus en en plus importantes aux yeux des recruteurs et cela s’est exacerbé avec la crise », observe-t-il, remarquant lui aussi une attente plus forte sur la flexibilité et le travail à distance. « Il est également attendu du candidat qu’il sache faire preuve d’esprit critique et résoudre des problèmes rapidement », ajoute-t-il. Éric Gras, spécialiste du marché de l’emploi chez Indeed, remarque quand à lui une attente forte sur la capacité d’apprendre en permanence et d’évoluer.
Un CV présenté par compétences
Mais comment répondre à cette attente des recruteurs concernant les soft skills ? Comment se présenter comme une personne « flexible » et « autonome » ? Romain Giunta conseille de présenter son CV par compétences. Des compétences qui peuvent être aussi bien techniques qu’humaines. « Si les expériences ne sont pas suffisantes pour présenter son CV de cette manière-là, il faut au moins réserver une section aux compétences pour prouver que les qualités recherchées par le recruteur sont bien acquises », recommande-t-il. On peut par exemple mettre en avant une expérience de télétravail pendant un stage, de quoi cocher la case du travail à distance si ce sujet est mis en avant dans l’offre d’emploi. Un petit plus que les recruteurs apprécient, car il facilite leur travail de tri des CV. Il permet également de se différencier.
Dans la même idée, Éric Gras invite à étoffer la rubrique dédiée aux passions, jusqu’à présent reléguée au fin fond du CV quand elle n’est pas carrément oubliée. « Cela permet de mettre en avant ce qui définit le candidat plutôt que son parcours. Ne pas hésiter, donc, à argumenter autour de ses passions car cela explique quelle personne est réellement le candidat et permet aussi de mettre en avant certaines soft skills », explicite Éric Gras. Il propose également, au lieu d’inscrire un simple titre en haut de son CV, d’y faire figurer un petit texte d’une ou deux phrases qui présente son expérience professionnelle mais aussi sa personnalité. « Cela permet de prendre le dessus sur le parcours qui ne reflète pas forcément qui est le candidat, étant donné qu’il peut exister des erreurs de parcours ou des métiers par défaut », estime Éric Gras.
Préparer son entretien, qu’il soit sur site ou à distance
Si la capacité des candidats à travailler à distance est plébiscitée par les recruteurs, ces derniers font également de plus en plus passer des entretiens à distance. C’est une des nouveautés apportée par la crise. « Entre février 2020 et janvier 2021, l’utilisation de la visio dans le recrutement a augmenté de 1 600 % et celle du téléphone de 60 %. Et on ne reviendra pas en arrière », rapporte Éric Gras. En effet, même si les recrutements en présentiel ont repris, un premier recrutement à distance est devenu monnaie courante. « Cette pratique s’est inscrite dans la culture du recrutement », pense Julien Frutoso. Un exercice à préparer comme une entretien en présentiel. « Je conseille de bien choisir son lieu, c’est-à-dire une pièce fermée, où personne ne rentrera le temps de l’entretien, sans animaux non plus pour ne pas être interrompu, une pièce lumineuse pour être bien visible », énumère Romain Giunta.
Il est également recommandé de tester son équipement technique avant, notamment sa connexion. Romain Giunta invite à se préparer comme pour un entretien physique, aussi bien au niveau du discours à tenir, que de la tenue. Mais aussi de l’attitude : Julien Frutoso rapporte le cas de candidats commençant l’entretien au volant de leur voiture, dans la rue ou avec leurs enfants dans les bras. « La posture doit être professionnelle : il faut se demander quelle attitude on adopterait en présentiel et s’y conformer », met-il en garde. Par exemple, un entretien sur site aurait nécessité de faire garder ses enfants : pourquoi ne pas également les confier à quelqu’un le temps d’un entretien à distance ?
En effet, les fondamentaux restent les mêmes : qu’il soit à distance ou en face à face, l’entretien doit être préparé, afin de montrer sa motivation. Ce qui veut dire le répéter (ce qui permet, de plus, d’être moins stressé), savoir quels messages on veut faire passer, préparer des questions à poser ou qui peuvent être posées par le recruteur…. Mais aussi se renseigner sur l’entreprise et le marché pour montrer son intérêt. « Il s’agit de se renseigner sur la structure, son organisation, ses implantations, etc… Des informations que l’on peut trouver sur le site institutionnel de l’entreprise. Mais aussi de faire un tour d’horizon de l’actualité de l’entreprise », détaille Julien Frutoso. Crise ou pas crise, certaines attentes restent immuables.
Par Ève Mennesson