Emploi

Comment bien s’exprimer pour convaincre ?

Pour un entretien d'embauche ou un rendez-vous avec des prospects, la capacité à bien formuler ses idées et à se montrer convaincant à l'oral est une compétence plus qu’utile. Comment la développer ? Découvrez les conseils et techniques de Philippe-Henry Honegger, auteur du livre "L’argument qui tue" (De boeck), pour travailler son éloquence et son potentiel rhétorique. Sa conviction : l’expression est comme un sport qui demande de l’entraînement quotidien.

En quoi la capacité d’expression est une compétence clé dans le monde du travail ?

Savoir bien s’exprimer et bien se faire comprendre est un des premiers éléments différenciants et déterminants en entretien et dans le monde du travail. Pour faire simple, la rhétorique consiste à réussir à bien dire ce que l’on a envie de dire, à exprimer ses avis et sa personnalité. Réussir à exprimer de la manière la plus fidèle possible ce que l’on pense est difficile. Le principe même de travailler avec des gens, c’est que tout passe par la communication. Vous risquez donc de subir des situations compliquées si vous ne savez pas vous exprimer à l’oral.

Aujourd’hui, on constate que beaucoup de personnes sont plus ou moins bloquées dans certaines situations car elles peinent à exprimer les choses et à formuler leurs idées. La capacité rhétorique, ce sont des postures et des réflexes à adopter. Je suis un avocat pénaliste, c’est donc mon quotidien de m’exprimer, de communiquer et d’essayer de convaincre. J’ai développé des techniques et méthodes qui peuvent s’adapter à beaucoup de situations.

Quelles sont les priorités pour une bonne communication à l’oral ?

Les premiers conseils relèvent du bon sens. Tout d’abord, il y a l’importance de la première impression, que j’appelle la crédibilité. On écoutera quelqu’un à partir du moment où on l’estimera crédible dans son expression et dans son image. Or, vous n’aurez pas deux fois la chance de faire une bonne première impression, de vous rendre crédible. La façon de se présenter et de s’habiller est donc importante. Et il ne faut pas oublier que vos qualités proviennent aussi de votre naturel. Si vous êtes quelqu’un de drôle, d’avenant, il ne faut pas hésiter à mettre en avant ces traits dès le début de l’échange. Cela peut passer par la préparation de quelques phrases d’accroche ou de présentation, après lesquelles il sera plus simple de développer les choses que vous souhaitez exprimer. Si vous essayez d’adopter un rôle et des traits de caractère qui ne sont pas les vôtres, cela se verra.

Bien s’exprimer, c’est comme un sport : cela demande beaucoup d’entraînement pour être performant à l’instant T, au moment où il faut sortir la phrase qui marche. La chance, c’est qu’en matière de communication, pas besoin de se mettre en short et en baskets pour s’entraîner ! Vous discutez avec un ami ? Profitez-en pour vous exercer à bien formuler vos idées. Demandez à votre ami si elle ou il a compris ce que vous exprimez. Et lisez des livres pour enrichir votre vocabulaire. Ce que je conseille aussi souvent, avant une rencontre ou une discussion importante, c’est de s’imaginer la conversion dans sa tête deux fois, trois fois, dix fois, jusqu’à ce que cela semble fluide. J’appelle cela la prévisualisation. Grâce à cela, on sera beaucoup moins impressionné et plus à même de répondre et de réagir de manière convaincante.

Vous insistez également dans votre ouvrage sur l’importance d’incarner ses arguments, pourquoi ?

Il y a toute une grammaire de la communication : les mots et le vocabulaire que l’on emploie, mais aussi le fait de regarder les gens dans les yeux, de parler avec ses mains, de faire passer une émotion, d’insister sur les bons mots pour réussir à faire passer son message. Comme je le rappelle dans le livre, on sait aujourd’hui que 80 % de ce qui sera communiqué lors d’un échange relève du non-verbal et du para-verbal. Ce que vos interlocuteurs retiennent, c’est avant tout votre émotion, la façon dont vous incarnez votre communication. Et l’émotion est ici entendue au sens large, cela peut parfois simplement être convaincu d’une idée et de ses arguments ou être enthousiaste. Il faut croire en ce que l’on dit avant de l’exprimer, c’est le moyen numéro un pour réussir à convaincre. C’est pour cela qu’il faut mener tout un travail préparatoire, pour identifier ses idées, les challenger, se convaincre qu’elles sont judicieuses, et ensuite les exprimer.

Que conseillez-vous pour bien communiquer dans un moment de tension ou de mise en difficulté ?

Le meilleur moyen de bien communiquer, c’est d’abord de réussir à comprendre la situation. Il faut donc avant tout savoir écouter, pour comprendre avant d’apporter une réponse. Dans une situation de conflit, je conseille donc de d’abord laisser parler l’autre, et de s’autoriser à répondre seulement lorsque vous aurez réussi à reformuler et à comprendre ce que la personne exprime. C’est là que l’expression « terrain d’entente » prend tout son sens, grâce à l’écoute, votre parole sera plus efficace et vous aurez plus de chances d’effectivement résoudre le problème.

Il faut rappeler qu’il y a toutes sortes d’éloquence. Beaucoup ont l’image d’un homme droit, qui parle fort et avec conviction, comme lors d’un discours enflammé. Ce n’est pas la seule forme d’éloquence ni celle à valoriser dans toutes les situations. L’éloquence, ce n’est pas juste parler avec beaucoup de certitudes et un regard intense. La méthode la plus efficace, c’est rester authentique, rester soi-même. On peut être éloquent en étant timide et en ayant une petite voix, si l’on prend soin de mener le travail préparatoire de formulation, d’organisation et d’incarnation de ses arguments. L’éloquence, c’est aussi trouver sa voix, sa communication naturelle, et d’en tirer le meilleur pour bien communiquer.  

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