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Formations, coaching… : est-ce bien utile ?

Si l’engouement des salariés, mais aussi des entreprises, pour les thématiques liées au développement personnel n’est plus à démontrer, à quoi ces prestations servent-elles vraiment ? Comment faire les bons choix entre les différentes offres proposées et les multiples structures présentes sur ce marché ?
 
Trente-six pour cent des formations effectuées dans le cadre du Droit individuel à la formation (Dif) sont dédiées aux thématiques liées au développement personnel, à la communication et à l’efficacité professionnelle. Elles arrivent ainsi en tête devant les langues (21 %), selon une enquête Demos et Kelformation.com, réalisée d’octobre 2010 à mars 2011 et intitulée “Droit individuel à la formation : quelle réalité pour les salariés ?” Certes, les formations métiers sont généralement suivies dans le cadre du Plan de formation de l’entreprise, mais cela est tout de même révélateur d’un engouement des salariés pour cette question.
Alors, véritable tendance de fond ou effet de mode ? “C’est une mode qui dure depuis longtemps”, ironise Jean-Louis Muller, directeur associé Groupe Cegos et expert en développement personnel. Je suis rentré en 1978 chez Cegos et c’était déjà la mode. À l’époque, le grand produit en plein développement était l’analyse transactionnelle. Depuis, le chiffre d’affaires a toujours été en croissance”.
Un avis que partage Claire Roy, responsable du domaine Efficacité professionnelle, Développement personnel et Communication de CSP Formation. Elle souligne toutefois un changement de taille : “Ce qui est nouveau, c’est que les entreprises prennent [cette question] au sérieux. Plus qu’un engouement et qu’une mode, c’est une vraie prise de conscience – presque un éveil – à l’importance et l’utilité de savoir se connaître, s’affirmer, se développer professionnellement, socialement, relationnellement…”
 
Pourquoi un tel engouement ?
Si l’intérêt pour la question du développement personnel semble donc bien ancrée, et ce depuis plusieurs années, Jean-Louis Muller rappelle que celle-ci joue tout de même un rôle différent aujourd’hui. Pour lui, elle est un enjeu majeur dans le contexte actuel pour plusieurs raisons : “Les choses sont tellement complexes, que les chefs d’entreprise, et nous-mêmes, disons aux cadres managers, aux chefs de projet, que le premier outil du manager, c’est eux”. En somme, dans des situations de changement (surtout dans les situations de crise nécessitant parfois des mesures impopulaires), un manager qui laissera entrevoir une sorte de flottement n’aura plus aucune autorité et ne parviendra pas à le faire accepter. “C’est bien d’avoir des méthodes, des recettes, parce que cela donne des repères, de bonnes pratiques, des pièges à éviter, poursuit-il. Mais aujourd’hui, sachez que vos attitudes et comportements sont sur-interprétés. Il serait dommage que ces derniers fassent que les changements ratent.”
Autre raison selon lui de cet engouement pour le développement personnel, le fait qu’il y ait “de moins en moins d’organisations collectives, une baisse des syndicats, etc. Du coup, les gens sont un peu face au ‘Grand Tout’. On leur dit que c’est le client qui pilote l’entreprise, qu’ils doivent se débrouiller et que c’est à eux d’organiser leur propre trajectoire professionnelle. Il y a intérêt à être solide”.
Les salariés, souvent stressés, sont également à la recherche de solutions les aidant à gagner en sérénité et en aisance. D’ailleurs, les formations peuvent aussi être des moments de pause, permettant de faire redescendre la pression mais aussi d’échanger, parfois entre cadres et non-cadres. “Il y a un effet cathartique, on exprime aux autres quels sont nos problèmes”, conclut-il.
 
Faire la différence
Pour Claire Roy, si les entreprises s’intéressent aujourd’hui à ce sujet, c’est tout simplement parce que cela a une répercussion sur l’efficacité professionnelle : “Toutes les études sociologiques et statistiques montrent que si vous prenez un leader, à un certain niveau, ils ont tous un développement cognitif équivalent. Ils ont tous fait de grandes études, ils ont tous une capacité à comprendre vite, à mettre les informations en parallèle, etc. Ce qui va faire la différence, c’est que ‘le grand leader’ a en plus une intelligence émotionnelle, une intelligence relationnelle. Ou plutôt, il y a prêté attention et il les a cultivées. Il a donc travaillé son développement personnel en termes d’intuition et de relations”.
Le manager doit également apprendre à tirer le meilleur de ses collaborateurs, à les rendre encore plus performants. Pour cela, il doit trouver les clés pour les motiver et les inciter à coopérer. La communication tient alors une place cruciale. Il s’agit de savoir transmettre de l’enthousiasme, de donner du poids à ses arguments pour convaincre. Sans intelligence émotionnelle, le cadre ne pourra véhiculer ces messages. “Un manager peut terriblement faire la différence, assure la responsable du domaine Efficacité professionnelle, Développement personnel et Communication de CSP Formation. Et on n’est jamais trop petit pour [cela], même un manager de proximité”.
Développer à la fois de la flexibilité, mais aussi de la solidité, connaître et entretenir sa motivation, trouver sa place dans l’entreprise, savoir relativiser, savoir gérer son stress et ses émotions mais aussi s’affirmer… : quelle que soit la place que tient le collaborateur dans la hiérarchie, ces atouts sont primordiaux. “Les systèmes sont gagnants quand ils ont une bonne capacité à travailler ensemble”, indique Claire Roy.
 
Quelles formations ?
D’ailleurs, comme le révélait une étude de CSP Formation, publiée en avril 2011, dans l’univers professionnel, la totalité des managers dont un collaborateur a suivi une formation en développement personnel – communication estime que celle-ci a eu un impact positif sur son savoir-faire et 97 % sur son savoir-être. Côté savoir-être, les participants ont constaté qu’ils ont une meilleure connaissance d’eux-mêmes et qu’ils gèrent mieux leurs émotions (48 %), qu’ils s’affirment et développent plus d’aisance en général (44 %) mais aussi qu’ils managent mieux les situations à enjeux ou conflictuelles (43 %). Sur le plan des savoir-faire, les formations ont, selon eux, permis d’améliorer la communication à l’oral (51 %), de changer le regard porté sur les autres et l’entreprise (44 %) et de générer un gain d’efficacité (44 %).
D’une manière générale, ces formations sont estimées positives par tous. Elles obtiennent en effet un taux d’impact de 7 sur 10, avec 30 % des notes comprises entre 7 et 8.
Si elles semblent convaincre, quelles sont les plus suivies ? “Mieux se connaître et s’affirmer”, “communiquer avec efficacité” et “développer son intelligence émotionnelle” sont les trois thèmes de formation arrivés en tête à la fois pour leur impact et leur attractivité, dans l’étude CSP Formation. La “prise de parole” ou la “gestion du stress et du temps” restent également très demandées.
 
Et le coaching ?
Outre les formations, l’une des méthodes qui peut s’avérer utile en matière de développement personnel est celle du coaching. Comme l’explique Ana Fernandez, coach et formatrice (EnergyCoaching), cette technique consiste à “accompagner un salarié ou un demandeur d’emploi dans l’obtention d’un résultat dont l’objectif est une transition professionnelle. Par cela, on entend soit rebondir sur un nouveau poste en restant dans la même entreprise, soit rebondir vers l’extérieur, soit trouver un poste quand on est demandeur d’emploi”. Le mot transition doit être entendu au sens large, une nouvelle prise de responsabilités, par exemple, peut effectivement soulever différentes questions, comme la nécessité de s’affirmer, de mieux gérer son temps ou de communiquer, etc.
En termes de fonctionnement, il s’agit selon elle, “d’un accompagnement côte à côte”, qui ne doit surtout pas être confondu avec d’autres dispositifs. “Ce n’est pas un bilan de compétences, ce n’est pas du mentorat, ce n’est pas une analyse, ce n’est pas une thérapie !, insiste-t-elle. La thérapie s’occupe du passé pour expliquer et améliorer le présent, le mentorat ce sont des exemples à suivre, des solutions toutes faites à mettre en place, le bilan de compétences, c’est l’état des lieux de vos savoir-faire par rapport au marché. Le coaching consiste à dire que vous avez sûrement des solutions que vous n’avez pas osé mettre en avant”.
Pour cela, il nécessite le respect d’une véritable déontologie afin qu’il ne sorte pas de ses champs de compétences. Pour Jean-Louis Muller, il ne doit jouer que sur “la construction du futur”. “En revanche, j’ai quelques réticences par rapport au coaching de type analytique, où les coachs vont aller chercher dans votre enfance le traumatisme initial… Là, je dis non ! Il y a deux métiers”, renchérit-il.
Hors de question donc de laisser ses mains entre un coach qui jouerait à l’apprenti sorcier. Comme le souligne Laurence Petit-Dessaint, directrice associée de JeContacteUnCoach.com, suivre un programme de coaching, c’est “se mettre en mouvement et accélérer le changement”. Pour elle, la méthode employée peut être comparée au travail mené par les coachs dans le domaine du sport : “Il y a un podium. Tout sportif qui veut l’atteindre va suivre un plan d’entraînement. Ce n’est que par l’action qu’il arrivera à ce résultat”.
Pour réussir, il convient de bien définir la difficulté et donc le but à atteindre. Un plan d’actions sera ensuite mis en place. L’idée est que le coaché puisse mettre en application dans son entreprise les points sur lesquels il travaille, et dresse ensuite un bilan afin d’en tirer un enrichissement concret.
Pour Ana Fernandez, lorsque le coaching est bien mené, les managers en ressortent “plus à l’écoute de leurs collaborateurs, se mettent davantage à leur place. Ils arrivent à mieux gérer leurs émotions, leurs coups de colère (…) et leur temps. Souvent, pour eux, tout paraît urgent. Lorsque nous leur apprenons à faire une différence entre les urgences et le reste, mais aussi à écouter la charge de travail de leurs collaborateurs, ils prennent un peu de recul”.
Le coaching va donc leur permettre d’aborder les mêmes situations d’une manière différente. Un cadre qui a tendance à s’emporter reviendra vers son collaborateur en précisant les points positifs d’un dossier avant de demander de revoir certains points, plutôt que de lui envoyer le document au visage.
 
Faire le bon choix
On l’aura compris, la sélection du coach est cruciale. Pour s’y retrouver face à la multitude d’acteurs – pas toujours fiables -, il convient de poser les bonnes questions. Vous pouvez notamment l’interroger sur la formation qu’il a suivie. Comme l’explique Ana Fernandez, “un coach n’est pas un bon conseilleur ou un bon confident, un bon ami ou une bonne oreille. Il faut être très emphatique, c’est sûr, il faut être à l’écoute de l’autre, ne pas vouloir donner des ordres, mais il faut surtout être formé. (…) En France, vous pouvez suivre des formations en institut privé, payer très cher et sortir avec une certification pour devenir coach. Mais il y a aussi l’université qui propose des diplômes reconnus”.
Pour ce qui est des formations obtenues en organismes privés, ce sont souvent la réputation de leur directeur ou directrice qui comptera. Certains peuvent être à la tête de fédérations comme l’Association européenne de coaching, la Société française de coaching ou bien l’International coaching fédération.
Privilégiez donc les structures ayant pignon sur rue, soyez attentif au bouche-à-oreille et suivez les conseils de votre service ressources humaines qui a très certainement l’habitude de faire appel à certains interlocuteurs. Rien de tel que les échos d’anciens coachés pour se faire une idée de ce qui vous attend. N’hésitez pas non plus à vous renseigner sur le parcours du coach et sur la profession qu’il exerçait auparavant. Les années qu’il a passées en entreprise joueront un rôle important. L’idéal, même si ce n’est pas indispensable, étant qu’il soit issu du même secteur que vous ou qu’il ait exercé le même type de responsabilités. Enfin, pour Ana Fernandez, “on peut rencontrer plusieurs coachs, s’il n’y a pas un lien, quelque chose qui passe, une certaine communication, cela ne le fera pas”.
Jean-Louis Muller évoque quant à lui un autre point : “En ce qui me concerne, j’ai un psychiatre spécialisé en systémique qui me supervise. Car moi-même, je peux rencontrer quelques difficultés, quelques doutes. Il faut que le coach puisse avoir l’occasion d’être supervisé par un tiers extérieur”.
Si le choix du coach n’est pas à prendre à la légère, celui d’une formation classique ne l’est pas non plus. Encore une fois, la notoriété a son importance. L’offre devra être présentée de manière très claire, c’est-à-dire qu’elle explicitera l’objectif à atteindre et ses répercussions sur le terrain. Les sites Internet des organismes seront alors souvent une mine d’informations mais attention, pour Claire Roy, “la capacité de l’organisme, du consultant, du formateur à écouter le besoin, à accueillir la demande” est également très importante. “Si vous avez quelqu’un qui essaie de vous vendre quelque chose avant même d’avoir écouté votre besoin, vos circonstances, votre contexte. (…) Il n’est pas performant dans le domaine !” 

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