« Je pense que nous observons aujourd’hui un mouvement qui va au-delà de l’expatriation, qui est celui vers davantage d’individualisation des parcours et des attentes, affirme Alix Carnot, directrice associée d’Expat Communication. Si on part en expatriation, ce n’est plus simplement parce que l’entreprise nous le demande, on part d’abord parce que l’on souhaite internationaliser son parcours et développer sa carrière, vivre une expérience familiale et avoir des enfants ouverts sur le monde. » Une analyse confirmée par les chiffres : selon les études réalisées par Expat Communication en 2023 et synthétisées dans le baromètre annuel intitulé Les visages de l’expatriation, excellence et vulnérabilité, les expatriés recherchent en priorité une aventure humaine, familiale et culturelle (48 %), une meilleure qualité de vie (41 %), une expérience professionnelle interculturelle (32 %) et une progression de carrière (31 %). À noter que les bénéfices finalement triés de l’expatriation sont également alignés avec les objectifs initiaux : développement personnel (68 %), découverte d’une nouvelle culture (66 %), hausse du niveau de vie (44 %) et expérience familiale positive (41 %). « Il s’agit là de retours de personnes actuellement expatriés, on sait qu’en revanche, les retours des personnes étant déjà revenues en France sont plus nuancés, souligne Alix Carnot. Ce qui est sûr, c’est que c’est un accélérateur de carrière, et l’on répète aux expatriés et aux entreprises l’importance de l’individualisation les parcours d’expatriation et d’y voir avant tout une aventure familiale et personnelle. »
Une aventure riche, mais pas sans risques
Si l’expatriation est donc une expérience prisée et aux apports affirmés, elle n’est pas sans risques. À commencer par le poids pour la charge mentale. « Les apports ne vont pas sans quelques sacrifices et efforts. Ce qui se traduit par une augmentation de la charge mentale et du stress de 20 % pour l’ensemble des expatriés et de 25 % pour les collaborateurs d’entreprise, pour qui la charge mentale résulte de la somme des tâches personnelles et professionnelles », rapporte la directrice associée d’Expat Communication. À cet écueil de la charge mentale, s’ajoutent les principales difficultés rencontrées durant une expatriation : manque de la famille (45 %), barrière de la langue (32 %) et manque du pays (29 %), solitude et isolement (26 %). Pour autant, l’impact positif de l’expatriation pour les familles expatriées, couples et enfants, se confirme, et 91 % des expatriés recommandent l’expérience, tout en se disant conscients des efforts nécessaires et des écueils à éviter.
« En tant qu’expatrié, on est souvent projeté dans une zone d’excellence et d’exigence, dans un contexte international, et il y aussi le fait qu’il s’agit de sortir de sa zone de confort, de développer des ressources et des compétences que l’on n’avait pas, ajoute Alix Carnot. Aujourd’hui, on observe une sorte de banalisation de l’expatriation, cela parait normal de partir vivre une expérience à l’étranger, mais l’expérience que l’on en retire reste très contrastée bien que majoritairement positive et bénéfique. »
Aventure familiale
S’agissant de l’aspect familial de l’expatriation, l’immense majorité des personnes concernées (90 %) sont convaincues que l’expérience est bonne, voire très bonne, pour leurs enfants. Et pour cause, les répondants mettent notamment en avant les bénéfices en termes d’ouverture d’esprit au contact d’autres cultures (56 %), l’acquisition de meilleures capacités d’adaptation (45 %) et l’apprentissage de langues étrangères (45 %). Aussi, 48 % des expatriés jugent que la meilleure tranche d’âge pour partir avec un enfant en expatriation est entre 0et 6 ans, contre seulement 10 % entre 12 et 18 ans. Autre source de préoccupation dans le cadre d’une mobilité internationale : la situation du conjoint et la dynamique du couple. En la matière, un tiers des couples estime que l’expatriation les a beaucoup rapprochés, tandis que 12 % disent s’être plutôt éloignés.
Sur un plan plus personnel, une part non-négligeable d’expatriés estiment que leurs valeurs ont été chamboulées par leur mobilité (16 % tout à fait chamboulées et 26 % un peu chamboulées). En matière de considérations écologiques, le baromètre avance ainsi que les enjeux climatiques sont importants pour 70 % des 18-59 ans, mais que seuls 42 % d’entre eux tentent d’adopter des pratiques plus responsables. « La conscience écologique est élevée, particulièrement chez les jeunes, comme dans le reste de la population, mais il arrive que certains expatriés soient un peu coincés face à ces enjeux, nous avons déjà vu des crises d’éco-anxiété chez des personnes expatriées à Dubaï par exemple », complète Alix Carnot.
Pour conclure, le baromètre d’Expat Communication liste les trois ingrédients d’une expatriation réussie, selon les priorités exprimées par les personnes interrogées : l’épanouissement et le bien-être des membres de la famille, l’équilibre personnel et professionnel et le sentiment de se sentir intégré ou adapté à la culture locale, et d’être conscient de la richesse culturelle. Aussi, il s’agit de rappeler l’importance de la préparation minutieuse d’une démarche d’expatriation, et des différents accompagnements spécialisés qui existent dans ce cadre, 35 % des expatriés connaissant peu ou pas ces dispositifs. « L’expatriation n’est plus un luxe réservé aux cadres ayant une situation très confortable, on voit de plus en plus de jeunes qui se lancent dès leur fin d’études ou pendant, et également beaucoup de retraités », affirme Alix Carnot.