Yoël Attali nous reçoit dans son cabinet d’audioprothésiste, au sein du magasin Krys optique de la rue Lecourbe (Paris XVe). Deux jours par semaine, ce professionnel de 29 ans y reçoit des patients pour ds tests auditifs, des appareillages et des contrôles de routine. Le reste de son temps est réparti entre les 9 magasins Krys Audition qu’il gère en employant trois autres audioprothésiste. « En France, un audioprothésiste a le droit de travailler dans trois magasins maximum », nous informe le jeune homme. Cette profession, qui nécessite a minima un bac +3 sous la forme du diplôme d’État d’audioprothésiste, il la décrit comme « une activité paramédicale dont trop peu de personnes ont conscience de l’importance, tant du point de vue curatif que préventif« .
Sur ordonnance d’un ORL, sur la base d’une simple gêne ou par volonté de réaliser un bilan auditif complet, les patients se rendent chez l’audioprothésiste pour évaluer leur audition en quelques minutes, à l’aide d’outils de mesures acoustiques. Et, selon le besoin, choisir un appareil pour compenser les pertes d’audition. « Je peux renvoyer les patients vers l’ORL, nous sommes un métier paramédical et nous n’avons pas le droit de retirer un bouchon d’oreille, par exemple », complète Yoël Attali. L’audioprothésiste n’est pas un simple technicien, mais bien un spécialiste de l’appareil auditif capable d’aiguiller ses patients avec pédagogie. En quelques minutes, Yoël m’explique le fonctionnement de mon audition, ainsi que la façon dont les appareils qu’il conseille comblent les pertes. Je mesure alors les connaissances et la responsabilité d’un audioprothésiste.

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Un métier pluriel
La profession peut s’exercer de différentes façons, selon la structure et la formation suivie. Justement, pour y voir plus clair, Yoël me donne un aperçu de la structuration de la profession : « Un audioprothésiste peut être amené à travailler dans trois types de structures. D’abord, les discounters (Vivason, Ideal Audition…) qui axent leur communication sur les prix. Ensuite, des réseaux de franchise, comme Optic Duroc, des coopératives, comme Krys Audition, ou des cabinets indépendants. Et, enfin, les enseignes qui se développent en succursales, et donc des grands groupes, comme Audika ou Amplifon, qui possèdent souvent leur propre marque d’appareils et proposent des prix plus élevés. »
Avant de devenir indépendant, notre hôte du jour est lui-même passé par un important groupe du secteur (GrandAudition), après trois ans d’école et deux ans de classes préparatoires. La partie formation, là encore, propose plusieurs voies. « Quand j’ai fait mes études, il y avait une poignée d’écoles en France qui prenait entre 15 et 30 personnes chaque année sur concours, précise Yoël Attali. Aujourd’hui, il n’y a plus de concours et cela se passe par dossier via Parcoursup. Grâce aux arrangements européens, on peut aussi se former en Belgique ou en Espagne, où il n’y a qu’un an et demi de prépa, et pas de concours. Puis, avec une équivalence via un simple stage de six mois, vous pouvez exercer en France. Mais cela peut aboutir à des formations assez inégales, quand j’accueille en stage une ou un jeune formé en France ou formé à l’étranger, je constate. »
Du test auditif à l’appareillage
Derrière son bureau, équipé de sa blouse et de son matériel spécialisé, Yoël reçoit des patients pour plusieurs types de consultations. « S’il s’agit d’un rendez-vous de contrôle et de suivi, cela peut se faire en 10-15 minutes, détaille ce dernier. En revanche, s’il s’agit d’un premier rendez-vous, nous allons mener plusieurs tests pour déterminer les pertes auditives avec précision et identifier les besoins de compensation. Avant de faire une préconisation concernant l’appareillage et la correction des pertes.«
Pour réaliser les différents tests (audiométrie tonale et vocale, test par conduction osseuse…), l’audioprothésiste utilise des outils paramédicaux et professionnels, étape par étape. D’abord, un entretien préliminaire, appelé anamnèse, durant lequel le professionnel pose des questions sur la perte auditive, sur les antécédents médicaux et familiaux, sur une potentielle exposition récente à un bruit très fort… Ensuite, place à l’examen des oreilles et aux tests. J’enfile une blouse et me voilà avec un otoscope à la main, un instrument médical avec une lumière et une loupe qui permet de visualiser le conduit auditif et le tympan, pour vérifier s’il y a des anomalies visibles (excès de cérumen, inflammation, bouchon d’oreille…).
Le test le plus courant ? Celui de l’audiométrie tonale, qui consiste à analyser la capacité auditive du patient à l’aide d’une série de sons « purs », à une seule fréquence. Équipé d’un casque, le patient écoute des sons, qui varient en fréquence et en intensité, et indique lorsqu’il entend bien un son. L’audioprothésiste peut également réaliser des tests par vibration et compléter le tout par une audiométrie vocale, qui évalue la réception et la compréhension orale. Grâce aux résultats de ces tests, le professionnel produit des audiogrammes qu’il doit interpréter pour déterminer le type d’appareillage adéquat. « Il y a quatre types de pertes auditives : les pertes environnementales (traumatismes sonores, accident de la route…), le facteur génétique ou congénital, le facteur ototoxique (prises médicamenteuses qui peuvent altérer l’audition), et le facteur temps, aussi appelé presbyacousie et auquel personne n’échappe (95 % des pertes)« , résume notre audioprothésiste.
Une grande satisfaction
D’un bout à l’autre de nos échanges, je remarque que Yoël insiste beaucoup sur un point : il parle de ses patients, et non de clients. « Pour moi, ce n’est pas la même chose, un appareil auditif répond à un besoin médical et assure un côté préventif. »
De fait, le métier est investi d’un fort sens des responsabilités. « Parmi les premières choses importantes, je commencerais par l’empathie et le souci du bien-être du patient, confirme Yoël Attali. Notre rôle est très important. Il y a un fort sentiment de satisfaction dans certaines situations. Quand je vois des parents pleurer en cabine parce que leur enfant retrouve une audition de qualité, ce sont des moments très forts. Mais il faut surtout être pédagogue. L’audioprothésiste ne prescrit pas un appareil, il accompagne son patient pour faire son choix. Je prends toujours le temps d’expliquer aux personnes le fonctionnement des canaux audio, de vulgariser leurs pertes auditives et la façon dont nous pouvons y remédier« , assure notre professionnel. Message reçu ?