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Piliers de la rhétorique : les dimensions de l’orateur !

Multiplication des concours d’éloquence, « À Voix Haute » nommé aux Césars, apparition d’un Grand Oral au bac, des dizaines de livres publiés chaque année : la prise de parole n’a jamais été autant en vogue ! Cette évolution se fait également sentir dans le milieu professionnel où la persuasion est devenue la compétence transversale la plus demandée selon une étude menée par LinkedIn. Ancien conseiller communication, mais surtout passionné par l’art oratoire depuis près de 15 ans, j’ai étudié les éléments qui permettent de développer cette compétence. Aujourd’hui, formateur pour Yapuka et Aguere, je vais vous confier un secret qui n’est pas si bien gardé : la persuasion repose sur les piliers de la rhétorique. Par Jean-Corentin Poisson, coach pour Yapuka.

Qu’est-ce que la rhétorique ?

On a parfois du mal à distinguer la rhétorique de l’éloquence. En réalité ils sont tous 2 constitutifs d’un tout : l’art oratoire, la prise de parole en public. L’éloquence désigne la manière de s’exprimer d’une personne et s’attache donc à la forme du discours. La rhétorique désigne quant à elle la technique du discours, un ensemble de règles et de procédés constituant l’art de bien parler, notamment pour convaincre. Pour simplifier, on peut dire que l’éloquence correspond à l’art du comédien qui incarne un discours et connaît les techniques d’utilisation de la voix et du corps, tandis que la rhétorique tient plus de la science de l’écriture du discours, le fond. Et comme on peut s’en douter, pour réussir ses prises de parole il faut cumuler les 2 !

À consulter aussi : Comment être éloquent lors d’un entretien ?

Les 3 piliers de la rhétorique

Le premier manuel de rhétorique que l’on connait date du Ve siècle avant JC et a été écrit pas l’un des plus grands esprits de l’Histoire de l’Humanité : Aristote. Dans son ouvrage, Aristote décrit un ensemble de règles et de préceptes parmi lesquels un triptyque qui est resté : Ethos, Pathos, Logos.

  • Le Logos correspond à l’appel à la raison du public : il s’agit de faire appel à des raisonnements logiques et à des preuves concrètes et fortes pour renforcer l’idée que l’on défend.
  • Le Pathos appelle à l’émotion : dans un discours, il est essentiel de faire naitre des émotions dans l’esprit de l’auditoire. Ces émotions sont diverses, positives ou négatives, et doivent être incarnées (souvent par le recours à l’éloquence)
  • L’Ethos est la partie la moins bien comprise de ce triptyque. Il traite de la personnalité de l’orateur. Pour développer l’ethos, il s’agira d’inspirer la confiance et la sympathie du public.

Le Logos, au service du cadre

Le Logos est l’instrument vital de la parole du cadre. Il doit expliquer des décisions rationnelles, présenter des projets concrets et faire appel à la logique.
La meilleure stratégie pour utiliser le logos est de passer par 3 étapes :

  • Rassembler les données et connaissances (les preuves)
  • Trier et organiser ces données
  • Etablir des raisonnements et conclusions logiques à partir de ces éléments

La puissance du logos réside à la fois dans le choix des preuves et dans la capacité à allier plusieurs formes de raisonnement.

Le Pathos, outil du manager

Le manager est un chainon humain du fonctionnement d’une société. Outre ses missions de cadre, il doit gérer une équipe et les émotions de ses membres. Ainsi il devra faire appel aux émotions et chercher à comprendre celles des individus pour maintenir et renforcer le fonctionnement du groupe. Comprendre les motivations d’un groupe, les émotions auxquelles il est sensible, permettra au manager de savoir quelles émotions invoquer pour faire réagir ce groupe et s’y adapter.

L’Ethos, la force du leader

Si vous faites appel aux bons arguments, aux bonnes émotions, mais que vous n’inspirez ni la confiance ni la sympathie, vous ne parviendrez pas à convaincre votre auditoire de la justesse de votre idée. L’ethos sert à établir votre crédibilité pendant vos discours mais demande aussi une attention particulière du fait qu’il se transmet d’un discours à l’autre et même en dehors des discours. Dans le cadre d’une entreprise, il est très fortement lié à l’image général que transmet l’orateur dans sa vie quotidienne. Ainsi même si sa présentation sur le lancement du nouveau produit est très bien construite, on aura toujours du mal à croire ce que nous dira Michel qui n’arrête pas de raconter des ragots à la machine à café. Heureusement il existe de nombreux outils pour renforcer la confiance, la crédibilité et la sympathie de l’orateur lors de son discours, tels que l’utilisation du sourire et de l’humour, la figure d’autorité (montrer que l’on est un expert du sujet) mais surtout les 3 éléments constitutifs de l’Ethos selon Aristote : le bon sens, la vertu, et la bienveillance.

L’articulation des 3 piliers

On comprend donc que ces 3 piliers sont essentiels à la construction d’un discours impactant et convainquant. Pour les conjuguer, on peut noter que la place royale du logos est la partie la plus longue du discours : l’argumentation. Le Pathos a quant à lui une place choisie au tout début du discours (l’exorde) et à sa fin (la péroraison). Ces 2 parties ont besoin d’émotion car on cherche alors à capter l’attention du public puis à terminer en lui laissant une image forte qui ancrera le reste du discours dans son esprit. Enfin l’ethos a sa place partout dans le discours mais également en dehors du discours. Il faut également noter que s’il s’agit des 3 piliers de la rhétorique, il existe beaucoup d’autres outils, méthodes et stratagèmes qui peuvent aider les cadres à mieux utiliser la parole en la rendant plus efficace et plus forte. L’éloquence a d’ailleurs elle aussi sa place dans la prise de parole en public en ce qu’elle est un outil facilitant la transmission du message et permettant de mieux exprimer les émotions. Mais en préparant une prise de parole, pensez d’abord à son fond avant sa forme : les conférences de Stephen Hawking ont été parmi les plus passionnantes et les plus impactantes pendant des décennies alors même que son corps lui interdisait d’avoir recours à l’éloquence.
Ne vous reste donc qu’à penser, ressentir et incarner votre parole pour la réussir !

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