Obligatoire dès que l’entreprise atteint 11 salariés*, la mise en place des délégués du personnel permet de représenter les salariés auprès de la direction. Mais il y a certaines conditions à respecter, tant pour être élu que pour remplir ce rôle.
Chaque entreprise d’au moins 11 salariés doit élire des délégués du personnel pour une durée de quatre ans. L’employeur est ainsi dans l’obligation d’amorcer une élection si ce “nombre est atteint pendant 12 mois consécutifs ou non au cours des trois dernières années, selon les textes de loi”, souligne Elsa Lederlin, avocate spécialisée en droit du travail. Une élection qui se déroule en deux tours : le premier étant réservé aux candidats mandatés par les organisations syndicales. Si aucun candidat n’est présenté ou élu, un second tour est organisé pour l’ensemble des salariés de l’entreprise. “Pour se présenter, il faut être âgé de 18 ans révolus, travailler dans l’entreprise depuis au moins 1 an et ne pas être conjoint, frère ou ascendant de l’employeur”, précise Elsa Lederlin. Par ailleurs, en fonction du nombre d’employés présents au sein de l’entreprise, sont élus un nombre spécifique de délégués titulaires et suppléants, pouvant aller jusqu’à 9.
Faire le lien entre employeur et salarié
La première chose est de distinguer le rôle du délégué du personnel et du délégué syndical. “Le premier remonte les droits des salariés tandis que le second porte leurs revendications. Ce sont deux choses bien différentes”, soulignent Stéphane Bloch et Fabrice Crosnier, avocats spécialisés en droit du travail. Et le principal rôle des délégués du personnel est de veiller à ce que la convention collective soit appliquée sans que les droits des salariés ne soient méconnus. “Ils portent la parole quotidienne des employés, selon Elsa Lederlin. Leur rôle est de faire le lien avec l’employeur, l’inspection du travail et éventuellement le conseil des prud’hommes.” Des prérogatives qui ont une répercussion sur les heures de délégations qui s’élèvent à 10 heures par mois pour les entreprises de moins de 50 salariés, 15 heures à partir de 50 salariés. Et contrairement aux membres du comité d’entreprise ou du CHSTC (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail), les délégués du personnel doivent prouver que toutes leurs heures de délégation entrent dans leur mandat. “Concrètement, quand ils se rendent à une réunion d’organisation syndicale, ils doivent démontrer que le sujet concerne un problème soulevé par les salariés. Tandis que les membres du CE ou du CHSTC peuvent y aller simplement pour se former. Bien entendu, cela concerne des personnes qui occupent seulement des mandats de délégué du personnel. Dans les grandes entreprises, ce n’est pas rare que les membres du CE aient aussi la casquette de DP”, détaille Elsa Lederlin.
Des réunions mensuelles
Les échanges entre la direction et les délégués du personnel doivent se faire de manière régulière soit, obligatoirement, une fois par mois. Au moins deux jours avant chaque réunion, les délégués du personnel posent par écrit leurs questions à l’employeur qui “a l’obligation de les mettre à l’ordre du jour et d’y répondre. Tout est alors consigné dans le registre tenu par les délégués du personnel et qui est à disposition de l’inspection du travail mais aussi des employés, un jour par quinzaine”, indique Elsa Lederlin. Et pour l’avocate, les délégués du personnel ne sont, a priori, pas tenus à la confidentialité des échanges. “On ne peut pas leur reprocher de révéler le contenu des réunions puisque les salariés ont accès à l’ensemble du registre. De plus, leurs attributions ne les conduisent pas à connaître des éléments économiques au même titre qu’un membre du CE”, indique Elsa Lederlin.
La confidentialité, un accord tacite avec la direction
Si le code du travail ne prévoit pas un devoir de discrétion du délégué du personnel à l’issue des réunions avec l’employeur, en revanche, certains sujets peuvent ne pas être consignés dans le registre. “C’est d’un commun accord entre les DP et la direction”, indique Stéphane Bloch. Cela peut concerner un problème spécifique à un salarié ou alors l’entreprise (restructuration, etc.). “Dans ce cas, il pourrait être reproché au délégué du personnel d’avoir révélé des informations sensibles qu’il aurait dû garder confidentielles” , souligne Elsa Lederlin. En effet, plusieurs décisions juridiques montrent qu’un DP peut être sanctionné s’il ne conserve pas secret certaines informations. “Les tribunaux considèrent, il est vrai, que les délégués du personnel ont les mêmes devoirs de confidentialité que les membres du CE”, précisent Stéphane Bloch et Fabien Crosnier. À savoir que, une fois élus, les délégués du personnel sont protégés pendant toute la durée de leur mandat ainsi que pendant les six mois qui suivent la fin de celui-ci. Ainsi, l’employeur ne peut pas les mettre à pied ou les licencier sans demander l’autorisation à l’inspection du travail. “Seul un avertissement peut être effectué sans contrainte”, souligne Elsa Lederlin.
*Attention, la loi El Khomri prévoit de relever les seuils sociaux dont ceux pour les élections des délégués du personnel. Si la loi entre en vigueur, les entreprises seront tenues d’organiser des élections que lorsqu’elles comptent au moins à 20 salariés.