Comment se préparer à un entretien d’embauche, en tant que personne en situation de handicap ?
Dans un monde idéal, j’aimerais que tout le monde s’assume et puisse parler de son handicap librement sans craindre d’être discriminé. La réalité est malheureusement tout autre. Il faut donc s’interroger et se préparer. Quand on me demande si oui ou non, il faut mentionner sa reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) sur son CV ou parler de son handicap au recruteur, je réponds qu’il n’y a pas de conseil unique et applicable à tous.
En premier lieu, en tant que candidat il faut se renseigner sur l’entreprise. A-t-elle une mission handicap ? Communique-t-elle sur ses initiatives pour la diversité, le handicap, l’inclusion ? Y a-t-il des collaborateurs handicapés qui ont pris la parole sur LinkedIn ? Si c’est le cas, je conseille alors de mettre sa RQTH sur son CV, si on est à l’aise avec cela. Et, si il y a une mission handicap, je conseille vraiment de passer par là pour postuler. Si, a contrario, on n’a pas trop d’infos sur la structure ou sur ses engagements, mon expérience me fait plutôt dire d’être plus prudent. Par exemple, en ne précisant pas son handicap sur son CV, pour attendre l’étape de l’entretien et voir si on se sent à l’aise pour en parler.

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Dans quelles circonstances faut-il en parler en entretien ?
Plusieurs cas de figures sont possibles. Si le handicap est directement visible ou si celui-ci a été précisé sur le CV, il n’y a pas de secret et autant en parler d’emblée pour éviter toute gêne ou maladresse. Si le handicap est invisible, je conseillerais alors de laisser le recruteur mener l’entretien de manière classique, de répondre aux questions. Et, si on se décide à en parler et qu’en fin d’entretien ou à tout moment le recruteur nous demande si on souhaite ajouter quelque chose, ce peut être l’occasion de se lancer. De présenter son handicap, sa RQTH si c’est le cas, les éventuels aménagements, les expériences positives avec de précédents employeurs… Quel que soit le cas de figure, le handicap ne doit pas monopoliser les échanges, ce n’est pas nécessaire de dépeindre tout le tableau ou d’en dire trop sur sa vie privée. Cela reste un entretien d’embauche à visée professionnelle.
Il faut donc aborder le handicap sous un angle professionnel ?
Ce qui est certain, c’est qu’aborder le sujet du handicap de manière trop négative ou misérabiliste, en tentant de susciter trop d’empathie sur sa situation, ce n’est pas la meilleure manière de se vendre ou de susciter l’intérêt du recruteur. Un employeur souhaite avant tout une personne adéquate pour le poste, dynamique et engageante. Trop parler de ses soucis personnels peut desservir. Présenter son handicap et éventuellement la façon dont il est survenu, pour ensuite parler des aménagements, c’est suffisant. Il faut rester factuel et ne pas être trop dans l’émotion ou le personnel. C’est pour cela que c’est important de recentrer la discussion sur ses compétences, son expérience, sa motivation.
La question des aménagements potentiellement nécessaires est alors cruciale ?
Il faut savoir que seuls 15 % des personnes handicapées ont besoin d’aménagement de poste. Beaucoup de personnes RQTH sont un peu plus fatigables et auraient par exemple besoin d’un peu plus de repos, mais beaucoup ne le demandent pas par peur d’être discriminé. C’est pourtant un droit et quelque chose de très important. La RQTH est un outil formidable pour permettre d’être à égalité de chance avec les autres collaborateurs qui n’ont pas de handicap. Il ne faut pas penser que la RQTH donne des avantages, cela apporte des compensations nécessaires. Il ne faut donc pas hésiter à parler de son handicap pour profiter de ce droit. Si les aménagements de poste sont nécessaires pour que l’on puisse travailler pleinement et exploiter ses compétences, c’est très dommageable de ne pas en parler. Et cela revient à risquer paraitre moins compétent que l’on ne l’est réellement. Il faut alors en parler pour ne pas se tirer une balle dans le pied.
Que pouvez-vous dire aux personnes qui décident de ne pas parler de leur handicap ?
Je n’encourage pas tout le monde à en parler absolument. Comme je le disais, cela dépend de chacun. Parfois, on peut aussi attendre la fin de la période d’essai, prendre sur soi le temps de faire ses preuves et d’être confirmé, si son handicap ne nécessite pas d’aménagements immédiats. Si son handicap nécessite un suivi médical ou un traitement peu contraignants, beaucoup préfèreront ne pas en parler et faire preuve de résilience. Il est important de rappeler qu’il n’y a aucune obligation légale de partager sa RQTH ou des informations sur son handicap. J’ai tout de même beaucoup de personnes qui me disent être gênées à l’idée de pas tout dire au moment de l’embauche. Je leur réponds que la meilleure réponse c’est de bien faire son boulot et de faire ses preuves. Et de parler du handicap lorsque on se sent à l’aise. Un employeur qui est satisfait d’un employé qui lui révèle après le recrutement ou la période d’essai qu’il est handicapé peut tout à fait comprendre l’hésitation à en parler d’emblée.
Je souhaite rappeler aux candidats en situation de handicap qu’il faut qu’ils aient confiance en leurs capacités du travail, leurs compétences. Quand on a des compétences ou que l’on a suivi des études, il n’y a pas de raison qu’on soit moins bon que les autres.