Titulaire d’un BTS Assurance, Cécile Tessier, qui vit près de Nantes, n’a pas poursuivi dans cette voie afin d’élever ses quatre fils. Lors d’un atelier d’orientation professionnelle, elle a eu le coup de foudre pour la soudure, s’est formée et en a fait son nouveau métier.
Cécile Tessier, quadragénaire d’origine parisienne installée depuis dix ans près de Nantes, n’en revient toujours pas : « C’est fou, tout le chemin parcouru ! Il y a un an et demi, j’étais maman à plein temps, et, depuis début mars, j’ai un CDI de soudeuse assembleuse. Le métier est très demandé : je suis sereine sur le plan professionnel, un sentiment que je ne connaissais pas. Gagner ma vie, c’est nouveau pour moi et cette agréable sensation d’indépendance n’a pas de prix. » Même si certains proches trouvaient que c’était une drôle d’idée de s’orienter dans cette voie à 45 ans, elle a tenu bon : « Ils ne se rendent pas compte du côté satisfaisant de mon activité. Et puis, c’est pratique d’avoir quelqu’un qui sait souder à la maison. Mon mari, ancien plombier, me soutient à 200 % : il savait que ça me plairait car j’aime le bricolage. J’adore mon boulot qui consiste à découper des pièces de métal dans de la tôle puis à les assembler, pour fabriquer un escalier par exemple. Je suis émue quand je vois les photos du résultat publiées sur le compte Instagram de mon entreprise. »
Un premier CDI
L’émotion, elle la ressent encore comme si c’était hier à l’évocation du courrier qui a changé sa vie, selon ses propres termes : « Rien que d’y penser, ça me donne des frissons ! En octobre 2021, la caisse d’allocations familiales et le centre d’information sur les droits des femmes et des familles m’ont proposé un atelier pour élaborer un projet professionnel et/ou personnel. Comme je m’ennuyais, je me suis dit, pourquoi pas ? » Elle est mère au foyer avec son petit dernier d’un an, après avoir élevé trois autres garçons. « J’étais dans le flou, je ne savais pas vers quoi m’orienter, mais je ne voulais pas m’enfermer dans un bureau. » Elle repense au Deug de Droit et au BTS Assurance qu’elle avait obtenus juste avant d’accoucher de son aîné, en 2001, et de se consacrer à ses enfants. « J’étais totalement investie dans leur éducation. Au bout de dix ans, je suis devenue bénévole dans une association d’aide administrative et juridique. Ce poste me correspondait bien, compte tenu de mes diplômes et parce que j’aimais accompagner les gens pour trouver une solution à leur problème. Cette expérience n’a duré que quatre mois car ça ne s’est pas bien passé à la maison : il était difficile de la concilier avec la vie familiale. D’autant que mon but était de ne pas inscrire mes fils à la garderie et le moins possible à la cantine. »
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Les années passent, les enfants poussent et, début 2019, Cécile Tessier se tourne vers l’association locale « Accès-Réagis » : « Elle est destinée aux personnes éloignées du monde du travail et, moi-même, j’avais perdu beaucoup de repères sociaux. Via cet organisme, j’ai fait le ménage dans des cantines, écoles, piscines municipales pendant deux mois. On m’a alors proposé un contrat à durée indéterminée de femme de chambre dans un petit hôtel : c’était le premier CDI de ma vie, une chance pour moi… Pourtant je ne suis pas restée, me sentant vite dépérir : six matins par semaine, je nettoyais les neuf chambres toute seule, je souffrais de la solitude et de la redondance des tâches. Je me disais qu’après quatre ans d’études, je n’étais bonne qu’au ménage, alors que j’avais l’impression de le faire depuis 17 ans déjà ! »
Un métier passion
Il lui faut attendre encore presque trois années avant d’avoir le déclic en recevant la lettre de la Caf et du CIDFF : « L’atelier hebdomadaire a duré trois mois et j’ai eu le coup de foudre pour la ferronnerie, lors d’une visite d’un plateau technique. » C’est l’agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) qui dispense ce cursus mais il s’avère trop cher pour Cécile Tessier. À la place, l’Afpa lui conseille les cours de chaudronnerie et soudure, financés par la région Pays de la Loire pour pallier la pénurie de main d’œuvre dans ce domaine. « En me renseignant et en rencontrant un soudeur, je me suis passionnée et, début 2022, j’ai commencé à me former. »
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Après sept mois d’enseignements et deux mois de stages, elle décroche, en septembre dernier, le titre de soudeuse assemblage industriel, équivalent à un CAP. « Les qualités humaines de Régis, mon formateur, m’ont permis de me sentir bien, même si j’avais l’impression de ne pas être à ma place, explique-t-elle. Une de mes spécialités, c’est le syndrome de l’imposteur. Le manque de confiance en moi était un frein, j’ai failli abandonner plusieurs fois. Régis m’a encouragée à continuer. » Dans sa petite promotion, il n’y a que deux femmes. Idem dans son nouvel emploi, trouvé en trois jours sans envoyer de CV. Néanmoins l’univers masculin ne dérange pas Cécile Tessier : « Il règne une très bonne ambiance. Je peux demander à un collègue de m’aider à porter des charges lourdes et moi, je lui rends service en retirant un film plastique quand il n’y arrive pas, puisqu’il n’a pas les ongles assez longs. Le directeur de la société défend la féminisation et ne me met pas la pression, ayant conscience que je débute. » Cécile Tessier poursuit donc avec enthousiasme sa nouvelle voie… Et la flamme n’est pas près de s’éteindre !