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Rupture conventionnelle : de nouvelles dispositions applicables

Un arrêt de la Cour de cassation autorise désormais la rupture conventionnelle en cas de suspension du contrat de travail pour accident du travail. Patricia Gomez-Talimi, avocat spécialisé en droit du travail et droit de la sécurité sociale au cabinet PDGB Avocats, analyse la portée de la mesure.

Le 30 septembre 2014, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en estimant que, sauf en cas de fraude ou de vice du consentement, une rupture conventionnelle peut valablement être conclue au cours de la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle. Le ministère du Travail a donc été désavoué, lui qui avait écarté la possibilité de signer une rupture conventionnelle en cas de suspension du contrat de travail donnant lieu à une protection particulière, par exemple, pendant un congé de maternité ou un arrêt de travail imputable à un accident du travail ou une maladie professionnelle.
 Par ailleurs, et dans un arrêt du 15 octobre, la Cour de cassation précise que, sauf dispositions légales contraires, la rupture du contrat de travail par accord des parties ne peut intervenir que dans le cadre de la rupture conventionnelle régie par l’article L. 1237-11 du Code du travail. À défaut, la rupture s’analysera en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La Cour de cassation prend position

Avant que les partenaires sociaux ne créent en 2008 la rupture conventionnelle, la jurisprudence permettait déjà aux parties de rompre le contrat à durée indéterminée d’un commun accord, en application du Code civil et plus précisément de l’article 1134 qui prévoit que “Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.”
Après l’introduction du dispositif de la rupture conventionnelle dans le Code du travail, il était légitime de se demander si la rupture amiable du CDI fondée sur l’article 1134 du Code civil était toujours en vigueur. La Cour de cassation vient de prendre position en indiquant que la rupture par accord des parties doit intervenir dans le cadre des dispositions spécifiques sur la rupture conventionnelle, la rupture amiable de l’article 1134 ne demeurant valable que dans les quelques cas autorisés par la loi.
 Les faits de l’espèce étaient éclairants en ce qu’ils expliquent pourquoi la Cour de cassation a pris une position aussi radicale pour les employeurs qui se retrouvent à devoir verser une indemnité d’un montant équivalent à celui de l’indemnité conventionnelle de licenciement alors qu’à la base, il ne s’agissait que de se séparer d’un commun accord.

La rupture amiable du CDI reste possible

Dans cette affaire, en effet, la salariée et son employeur avaient mis fin au contrat de travail en avril 2009 par un simple document signé des deux parties. La salariée avait par la suite attaqué cette rupture non homologuée par l’inspection du travail devant le juge prud’homal et réclamé des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Pour sa défense, l’employeur avait fait valoir que les parties restaient libres de ne pas se soumettre au nouveau régime de la rupture conventionnelle et de conclure un accord de rupture amiable sur le fondement de l’article 1134 du Code civil.
Pour la Cour de cassation, c’est bien la rupture conventionnelle qui doit désormais prévaloir en toute occasion (ou presque) : “sauf dispositions légales contraires, la rupture du contrat de travail par accord des parties ne peut intervenir que dans les conditions prévues par [l’article L. 1237-11 du Code du travail] relatif à la rupture conventionnelle.”
Dès lors, l’employeur qui n’a pas fait bénéficier à sa salariée du dispositif protecteur de la rupture conventionnelle doit être condamné pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. La rupture amiable du CDI fondée sur l’article 1134 demeure possible pour les départs négociés intervenant dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) ou d’un accord collectif de la Gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC) et pour le contrat d’apprentissage. Rappelons par ailleurs que les dispositions sur la rupture conventionnelle ne s’appliquent donc pas à la rupture d’un commun accord du CDD (C. trav., art. L. 1243-1).
 

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