Emploi

Se réinventer grâce à la mobilité interne

Il n’est pas toujours nécessaire de quitter son employeur pour redonner du sens et un nouveau souffle à sa carrière. Transiter en interne peut être une option intéressante pour qui se questionne sur son avenir sans pour autant vouloir révolutionner du tout au tout sa vie professionnelle. Retrouvez les conseils de Caroline Averty et Marina Bourgeois, dirigeantes du cabinet Oser rêver sa carrière.

Si vous êtes actuellement en pleine réflexion quant au cap à donner à votre carrière, il peut en effet être pertinent, si bien sûr vous êtes (toujours) en phase avec les valeurs et le message de votre entreprise, d’envisager une mobilité en interne. Il s’agit d’une option judicieuse pour faire bouger les lignes de votre vie professionnelle, acquérir de nouvelles compétences et vous ré-inventer.

La mobilité au service de votre développement professionnel

En pratique, il existe trois grands types de mobilité :

  • La mobilité verticale via laquelle un collaborateur devient par exemple manager ou responsable d’un service/département/business unit, etc ;
  • La mobilité horizontale via laquelle le salarié change de métier en interne ;
  • La mobilité géographique via laquelle il change de lieu de travail tout en restant au même poste ou en cumulant une autre des deux mobilités précitées à cette occasion.

Ces dispositifs sont en pratique largement sous-exploités aujourd’hui. Selon une étude Hays, la mobilité interne ne concerne en effet que 5 % des recrutements alors que 60 % des salariés la choisiraient plutôt que de quitter leur entreprise. Il s’agit donc d’une véritable opportunité pour les employeurs de fidéliser leurs collaborateurs et, pour ces derniers, une occasion de donner un nouvel élan à leur carrière.

Penser mobilité n’est toutefois pas le réflexe premier d’un salarié en questionnement qui envisage bien souvent :

  • une sortie de son entreprise pour en intégrer une autre sur le même type de poste, lui permettant ainsi de changer d’environnement de travail et/ou de secteur ;
  • une potentielle reconversion (douce ou radicale) mais ailleurs. Rares sont en effet les personnes venant à nous pour se reconvertir et imaginant cela possible dans leur organisation. Nous leur suggérons parfois cette option mais elles n’en ont que (trop) rarement le réflexe.

La piste interne mérite pourtant d’être envisagée, d’autant que nombreuses sont les entreprises ayant une véritable politique de mobilité, affichée, efficace et accompagnée. Nous travaillons en effet main dans la main avec de telles entreprises qui n’hésitent plus à recourir à des prestataires externes pour favoriser et structurer la mobilité interne de leurs collaborateurs.

Pourquoi, dès lors, les mobilités ne sont-elles pas plus utilisées en pratique ?

Parce que les freins sont encore très (trop) nombreux. Ils reposent bien souvent sur des croyances limitantes ayant la vie dure. “Les annonces publiées en interne sont de toutes les façons déjà pourvues avant même leur diffusion”, clame Hélène, salariée d’un grand groupe français du secteur bancaire. “Ils ne recrutent qu’en externe et puis c’est mal vu”, pense Cédric, salarié d’un groupe spécialisé dans l’optimisation fiscale. “La mobilité, c’est un peu comme la rupture conventionnelle dans ma boîte : ça ne se fait pas…”, indique Claudia, l’une de nos accompagnées directrice des achats. “En France, on vous embauche pour ce que vous savez faire !” entend souvent Carine Celnik, dirigeante de TestUnMétier, solution permettant de tester un métier avant d’en changer. Il y a notamment, selon elle, “un gros travail de fond et de réassurance à faire côté employeur pour accepter d’embaucher des personnes qui n’ont jamais fait le métier visé mais qui ont une profonde motivation pour y arriver”. Les entreprises se sont pourtant fortement emparées du sujet ces dernières années, avec des politiques RH plus volontaristes. Notamment après les crises successives, où les recrutements externes ont fortement diminué (voire ont été interdits ou gelés dans certaines structures), ce qui a poussé les organisations à être audacieuses dans leur gestion des mobilités.

Que la politique interne soit ou non engageante, il est important de ne pas évacuer l’option mobilité sans l’avoir sérieusement envisagée et analysée. Cela réclame évidemment une dose d’audace puisque, pour passer à l’action et avoir une bonne visibilité du champ des possibles en interne, il faut que le collaborateur intéressé s’empare du sujet, qu’il soit pro-actif et qu’il communique avec les parties prenantes : managers, RH (et parfois responsable.s de la formation). Une mobilité réussie est en effet un projet co-construit en “triangle” avec le manager et les responsables des ressources humaines (le fameux “triangle de la réussite”).

Faire émerger une idée à partager avec vos managers et vos RH

La première étape consistera à faire émerger une idée à partager. Pour cela, il est important, en amont :

  • de faire le point sur votre carrière, de clarifier vos attentes, votre “pourquoi” : gagner en compétences ou en équilibre vie professionnelle/vie personnelle ; construire une nouvelle vie dans une autre région ; faire un gap financier, etc ;
  • d’identifier l’ensemble de vos contraintes et contingences : familiales, financières, organisationnelles, géographiques, médicales, techniques, etc afin de construire un projet non fantasmé mais viable et réaliste et de parer à tout obstacle pouvant faire échouer votre mobilité ;
  • d’identifier vos compétences manquantes/lacunaires, que vous pourrez combler en élaborant un plan de formation ou les acquérant de façon empirique. Un “bilan ou mapping compétence” pourra être judicieux.

Il s’agit, dans cette première étape, de procéder à une véritable introspection, d’identifier votre (vos) zone(s) de flow, autrement dit les activités/tâches quotidiennes qui vous mettent en joie, que vous aimez pratiquer et dans lesquelles vous vous estimez compétent(e). Bref, d’identifier votre juste place. Pour cela, des dispositifs existent : bilan de carrière, bilan de compétences, etc.

Objectif ? Identifier ce dont vous avez vraiment envie afin de pouvoir ensuite vous confronter à la réalité et à la typologie de postes potentiellement faits pour vous.

Avoir une bonne “vision métier”

Dans le même temps, il est indispensable d’avoir une bonne visibilité des métiers, l’un des freins à la mobilité étant bien souvent la méconnaissance de ces derniers. “Il en existe plus de 12 000” indique Carine Celnik. Personne ne maîtrise l’ensemble des tenants et aboutissants de tous les métiers d’une organisation. Or et à l’évidence, il est difficile, voire impossible, de se projeter dans un métier que l’on ne connaît pas. Il faut donc a minima pouvoir échanger avec des professionnels du métier visé pour se rassurer sur les attendus et les conditions de travail. Ouvrir les écoutilles, se balader dans les différents services, identifier qui fait quoi, poser des questions, solliciter des rendez-vous, etc vous aidera beaucoup en ce sens. De même, l’enquête métier et/ou de service (plus formelle que le seul échange) vous assurera de prendre conscience des avantages et inconvénients d’un poste.

Objectif ? Prendre une décision en pleine connaissance de cause, en vous rapprochant au plus près de la réalité opérationnelle et quotidienne du poste convoité.

Autrement dit, il est important d’adopter le bon mindset pour chercher les opportunités : réseautage et ouverture d’esprit en interne, travail sur l’art de se faire connaître et de se valoriser (personal branding, etc), se renseigner afin d’appréhender au mieux les pistes potentielles, enquêter et tester pour s’assurer d’un bon matching final.

Comprendre les intérêts respectifs

Si vous avez une vraie envie de transiter en interne et que vous vous sentez prêt.e, votre entreprise ne l’est peut-être pas (encore). Certains managers préfèrent parfois recruter une personne en externe qui “coche” toutes les compétences requises et qui est immédiatement opérationnelle, plutôt qu’un collaborateur en interne qu’elle devra (parfois) former. L’échange avec vos RH sera alors primordial afin de faire tomber les éventuelles réticences. De même, vous pouvez vous trouver dans la situation où votre manager ne souhaite pas vous perdre parce qu’il vous trouve particulièrement doué(e), efficace et performant. Il peut aussi ne pas avoir le budget pour vous remplacer si vous partez dans une autre équipe/service/département, etc. Autrement dit, votre souhait de transiter peut être perçu comme une lourde perte. La rétention des talents par un manager n’est pas rare mais elle peut être évitée lorsque la mobilité est co-construite et anticipée au maximum afin, par exemple, d’aider au processus de recrutement du successeur, d’organiser une bonne passation.

Travailler votre rapport au changement

L’un des nombreux freins à la mobilité tient souvent à la peur de l’inconnu : “On peut être bloqué par la peur de sortir de sa zone de confort avec tout le lot de croyances limitantes qu’une telle peur engendre : “je n’ai jamais fait ce métier, en suis-je capable ? Je n’y arriverai pas, cela prendra trop de temps, etc.” partage Carine Celnik. Là encore, rien de mieux qu’échanger et multiplier les rencontres. La prise d’informations diminue la crainte naturelle et légitime du changement.

Être au clair sur le processus de mobilité

Il est important que vous maîtrisiez le processus interne de mobilité. N’hésitez pas à le demander en interne aux personnes compétentes. De même, il peut être pertinent de rencontrer des personnes ayant déjà transité dans l’entreprise afin de bénéficier de leurs conseils. Rien ne vaut l’expérientiel ! Cela vous permettra ensuite de mettre en place un plan d’action efficace en commençant par semer des graines, en avançant pas à pas (#kaïzen) de façon structurée et éclairée et de préparer votre pitch ainsi que vous outils de candidature afin de valoriser au mieux votre projet, votre envie et vos skills, soft comme hard !

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