Entreprendre

Témoignages : ils ont entrepris avant 30 ans

59 % des 18-34 ans souhaitent se mettre à leur compte dans les cinq ans*. Alors que le CDI ne les fait plus rêver, de plus en plus de jeunes montent ainsi leur boîte, souvent sans même passer avant par la case du salariat. Témoignages de quatre entrepreneurs en herbe qui ont cru en leurs rêves. Ils sont aujourd’hui à la tête d’entreprises florissantes. Des projets enthousiasmants qui pourraient vous inspirer…

Judith Lévy

Briser le tabou du cancer

« À 19 ans, j’ai perdu ma maman d’un cancer. Parmi toutes les difficultés rencontrées, j’ai été étonnée qu’aucune solution n’existe pour apaiser les effets secondaires des traitements anticancéreux sur la peau. À la fin, ma mère ne pouvait plus rien toucher et attraper, ni poser ses pieds par terre. Alors qu’il existe des dizaines d’anti-rougeurs ou d’anticernes, personne ne semblait s’intéresser aux personnes qui souffraient de ces symptômes pourtant classiques. Cette idée ne m’a jamais quittée, j’y ai consacré mon projet de fin d’études d’école de design. Mais je n’étais pas entrepreneuse dans l’âme, je n’aurais pas monté une boîte seule. Lors de mon stage de fin d’études, j’ai rencontré Juliette, qui allait devenir mon associée. Elle aussi était concernée de près : toutes les femmes de sa famille ont été touchées par le cancer. Elle avait une formation plus business. Six mois plus tard, nous lancions la marque Même. On avait alors 23 ans. On nous dit souvent que c’est impressionnant d’avoir créé une entreprise si jeunes, mais nous n’avions rien à perdre. Si cela ne marchait pas, nous pouvions revenir sur le marché du travail. Quand on n’a pas d’expérience, on se ferme aussi moins de portes. Notre objectif était que Même devienne la marque dermo-cosmétique incontournable pour les personnes malades. Il est atteint. Nous venons d’être rachetées par le groupe Pierre Fabre, qui était notre actionnaire depuis cinq ans. Notre projet désormais : développer Même à l’international. »

Antoine de Sutter

L’entrepreneuriat en héritage

« Les bières artisanales de Sutter sont nées dans une grange, chez nos parents ! Avec mon frère, nous faisions des études d’ingénieurs en agronomie. Pour s’amuser, nous avons commencé à tester des recettes. Puis, on s’est fabriqué une petite unité de production avec du matériel d’occasion pour tester le marché, sans prendre de risque financier. À la fin de mes études, on s’y est mis à temps plein. J’avais 24 ans, un master 2 d’économie et gestion, mon frère 26, un master 2 en génie brassicole. Issus d’une famille d’entrepreneurs, cela ne nous est jamais venu à l’idée de travailler pour quelqu’un d’autre que pour nous. C’est important de commencer jeunes : on ne compte pas son temps, on n’a que soi à penser, pas encore d’enfants, de maison… La difficulté, c’est d’arriver à être crédibles auprès des banques et des fournisseurs : il faut tout le temps faire ses preuves. Au bout d’un an et demi, on ouvrait la brasserie, à quatre. En se lançant, on s’était dit qu’on aurait gagné notre pari si on finissait avec une brasserie qui produisait 15 000 hectolitres par an. On en produit 30 000 aujourd’hui. On a 36 salariés. On est dans une phase de développement et d’amélioration continue. D’autres challenges et problématiques, notamment avec la flambée du coût des matières premières et de l’énergie. Il y a un an, on a créé un bar dans la brasserie. On cherche de nouveaux marchés et débouchés commerciaux. On a aussi monté une distillerie. C’est passionnant, on retrouve l’ambiance de nos débuts. »

Paul-Arthur Klein

Faire pousser les projets

« J’ai toujours été attiré par l’agriculture bio et urbaine, par l’idée de remettre de la nature comestible en ville, de créer du lien social. Après mon master en gestion de l’environnement à Rennes, j’ai créé, à 23 ans, l’association Jeunes Pousses avec Inès, que j’ai rencontrée pendant nos études. J’avais vraiment envie de créer quelque chose : quand Inès a suivi une autre route, j’ai décidé de continuer seul. En attendant les autorisations de la mairie pour lancer Tipi, une ferme urbaine à Avignon, j’ai créé une champignonnière urbaine dans le centre-ville, au cœur d’un hôtel-restaurant étoilé. Le projet était innovant, il a contribué à faire connaître l’association. Nous avons ensuite créé la ferme urbaine, qui a eu un succès fou : 1 000 personnes sont venues à l’inauguration. Nous avions déposé l’idée au budget participatif de la ville, les habitants votaient pour leur projet préféré et le nôtre a gagné ! Nous avons toujours eu des bénévoles, c’est ce qui participe au succès du lieu. Aujourd’hui, nous sommes 8 salariés. Au printemps, nous allons créer une seconde ferme urbaine et lancer des formations pour les porteurs de projets de tiers lieux dédiés à la transition écologique. Ce qui me plaît au quotidien, c’est la grande part de créativité dans ces projets, de décider là où on veut mener la barque. J’ai découvert ces dernières années la casquette de chef d’entreprise nécessaire au bien-être de l’association, que je n’avais pas vraiment anticipée : les journées à gérer les équipes, les finances, le budget. »

Lena Crolot

La tech à impact positif

« Billiv est né d’une idée que j’ai eue au lycée. J’étais dans un magasin à Paris et une femme qui avait acheté un porte-clés a reçu un immense ticket de caisse. Pourquoi imprimer un tel bout de papier ? J’étais choquée par ce gaspillage. Cette idée m’est restée en tête pendant mes études à New York, où j’ai suivi un double cursus économie et informatique. J’y ai rencontré Ruben, mon futur associé. Nous avons commencé à travailler sur le projet en 2019, j’avais 19 ans. En 2020, la loi anti-gaspillage était votée : c’était un très bon argument pour s’y mettre à fond ! J’avais toujours eu cette envie d’utiliser la tech pour résoudre des problèmes en ayant un impact positif. On a construit le projet à côté de nos études, étape par étape. Aujourd’hui, nous sommes présents dans 500 magasins en France, nous avons un 3e associé, David, on a fait une levée de fonds… Et nous sommes 13 dans l’équipe. Entreprendre jeune, c’est une formation accélérée sur tous les domaines qui concernent une entreprise, j’apprends tous les jours. Femme et jeune dans la tech, j’ai dû parfois faire face à des remarques : mon associé, c’était “monsieur,” moi c’était “ma petite”. C’est difficile au début d’avoir de la légitimité. Ce qui nous a vraiment aidés, c’est d’être bien accompagnés. On a suivi le programme des Audacieuses à la Ruche. On a ensuite intégré l’incubateur Station F et créé la société. Ce qu’on espère : que Billiv devienne un réflexe, que les gens pensent QR code et non plus papier. »

*Source : L’observatoire Hello bank! de l’envie d’entreprendre, novembre 2023.

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