Deux économistes de l’Institut des politiques publiques (IPP) proposent que la réforme de l’assurance-chômage, en négociation depuis ce mercredi 30 septembre, généralise le bonus-malus de cotisations des entreprises lié à leur usage des contrats courts.
Dans une note intitulée “Faut-il moduler les cotisations des employeurs à l’assurance-chômage ?”, deux économistes de l’Institut des politiques publiques (IPP) préconisent de généraliser le système de bonus-malus sur les contrats courts, prévu par le gouvernement en 2019, et qui devrait s’appliquer en 2021.
Pour l’heure, il est prévu que ce dispositif ne s’applique qu’aux entreprises d’au moins 11 salariés implantées dans 7 secteurs qui représentent 34 % des ruptures de contrat de travail ; dont la fabrication de denrées alimentaires, l’hébergement-restauration et les transports/entreposage. Dans ces domaines, les entreprises emploient, en moyenne, deux personnes en contrat stable pour plus de trois personnes en contrat précaire, soit trois CDD pour deux CDI.
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Étendre le bonus malus sur les contrats courts à tous les secteurs
Mais pour lutter contre la précarité, les chercheurs de l’IPP estiment que “pour être efficace”, ce système de bonus-malus devrait être étendu à l’ensemble des entreprises et des secteurs. Selon eux, le régime d’indemnisation des demandeurs d’emploi a été amené, au fil du temps, à consacrer une part croissante de ses ressources pour couvrir les personnes alternant contrats courts et périodes d’inactivité. Ces “transferts de ressources entre niveaux de revenus” ayant petit à petit transformé l’assurance chômage en un “instrument de redistribution”, rompant avec “l’idée de proportionnalité entre les contributions et les droits”.
“Un système de bonus-malus permet de moduler les cotisations à l’assurance chômage des employeurs en fonction de l’équilibre entre leurs cotisations et les dépenses d’indemnisation qu’ils provoquent lorsqu’ils se séparent d’un salarié. Un tel système permet de stabiliser le marché du travail, à la fois en limitant les licenciements temporaires et en limitant les fluctuations de l’emploi en cas de choc agrégé. Mais il doit être généralisé, car si les écarts moyens sont importants, des différences persistantes existent entre entreprises d’un même secteur” indiquent les économistes. Selon eux, une modulation “de plus ou moins un point de pourcentage (deux pour l’intérim)” réduirait les “subventions croisées” de 20 %.
Ce système, qui consisterait à moduler les cotisations, en majorant celles payées par des patrons qui font un usage intensif des contrats courts, est le seul outil pouvant “casser cette tendance”, estiment-ils, en poussant les employeurs à modifier leurs pratiques.
“A ceux qui mettent en avant la crise sanitaire ou la complexité d’un tel mécanisme, nous rappellerons qu’il existe aux Etats-Unis depuis la crise des années 1930. Le choc économique y était aussi de grande ampleur, et les capacités opérationnelles des administrations étaient bien moindres qu’aujourd’hui”, ajoutent les économistes. “De plus, il n’y a aucune raison de penser qu’un tel système est un poids pour l’emploi. Il est possible de le mettre en place progressivement et de manière à ce que la majorité des entreprises voient leur taux de cotisation baisser ou rester inchangé”, notent-ils encore dans une tribune diffusée dans le quotidien Le Monde.
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Limiter l’APLD
Les chercheurs recommandent aussi de revoir le mécanisme “d’activité réduite”, ou APLD (activité partielle longue durée), qui permet de cumuler revenus d’activité et allocations-chômage. “C’est un dispositif certes essentiel mais qui, sous sa forme actuelle, accentue la concentration des transferts financiers sur un petit nombre d’actifs, de secteurs et d’entreprises. Mal maîtrisé, il crée une disproportion entre les droits acquis et les contributions censées les justifier”, écrivent-ils.
Les économistes conseillent ainsi de limiter le nombre de jours pouvant être passés en activité réduite et de “modérer les prolongations de droits qu’elle autorise, tout en gardant le principe qui permet aux chômeurs de compléter leurs revenus d’allocation et de garder un contact avec l’emploi”.