Après l’avoir repoussée à trois reprises, le gouvernement envisage de mettre la réforme de l’Assurance chômage en sourdine jusqu’à la reprise de l’économie. Donc après la pandémie et la crise, qui ne devrait pas prendre fin avant 2022.
La réforme de l’Assurance chômage ne devrait probablement pas être mise en place en 2021. C’est ce que les partenaires sociaux, consultés sur le sujet par le gouvernement, ont laissé entendre à la presse, le lundi 25 janvier. Les syndicats et le patronat ont été entendus toute la journée d’hier par le ministère du Travail, afin de réfléchir aux conditions d’application des mesures censées se mettre en place au 1er avril 2021. Des mesures déjà repoussées à trois reprises.
“Pas le bon moment”
Selon Eric Chevée, le représentant de la CPME, désormais, “l’idée est de définir des modalités d’entrée en vigueur, pour arrêter avec les reports de 3 mois en 3 mois.” Selon Élisabeth Borne, cette réforme sera menée “à terme”. Mais depuis plusieurs mois, la ministre et les partenaires sociaux planchent sur un “réaménagement”.
Face aux inquiétudes des syndicats, qui redoutent une fragilisation des demandeurs d’emploi dans une période de crise, Elisabeth Borne a en effet proposé (en novembre 2020) des aménagements. Des modifications destinées à faire évoluer les conditions d’éligibilité à l’assurance-chômage, et donc à éviter une baisse trop importante des indemnisations. Pour cela, le gouvernement prévoit principalement de revoir les nouvelles modalités d’acquisition de droits et le nouveau mode de calcul du montant de l’ARE.
Mais il faudra donc attendre. Denis Gravouil, le négociateur de la CGT sur les questions liées à l’emploi et au travail, explique que “le gouvernement ne veut pas renoncer à sa réforme, mais a compris que ce n’était pas le moment”. La mise en œuvre de la réforme de l’assurance chômage ne devrait pas être mise en action avant que le ministère et les partenaires sociaux aient ”trouvé les bons indicateurs pour la programmer, quand cela ira mieux”, indique le syndicaliste.
“Il reste un travail assez technique à effectuer sur les indicateurs à retenir : taux de chômage, nombre de demandeurs d’emploi, offres d’emplois non pourvues, création d’emplois”, observe de son côté Eric Chevée. Le résultat de ce travail devrait être présenté aux partenaires sociaux lors d’une réunion multilatérale, autour de mi-février.
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Pas de “retour à la normale” avant 2022 ?
Le sort de la réforme de l’assurance-chômage dépend donc désormais de la reprise de l’économie et de l’emploi. Mais difficile de prédire quand cette reprise aura lieu. Compte tenu des incertitudes qui entourent encore l’évolution de la situation sanitaire en ce début d’année, les prévisionnistes font preuve de prudence. Certains se montrant même pessimistes.
Les prévisions des institutions et des organismes de recherche divergent concernant la croissance de la France. L’Insee table sur une croissance de 3 % au premier semestre 2021, et de 2 % au second, après une récession de 9 % l’an passé. De son côté, la Banque de France prédit une contraction du PIB de 9 % en 2020 et une reprise de 5 % cette année. Du côté du gouvernement, plus optimiste, on prévoit une croissance de 6 %, dont environ 1 % serait tiré du plan de relance.
En revanche, les prévisionnistes s’accordent sur le retour de l’activité à son niveau d’avant crise : selon la majorité d’entre eux, cela ne se produira pas en 2021. D’après l’Insee, l’économie française devrait tourner en milieu d’année à 97 % de son niveau du quatrième trimestre 2019.
Dans ses dernières publications d’octobre 2020, l’OFCE prévoit pour sa part que fin 2021, l’activité devrait être encore inférieure de 1,4 % à ce qu’elle était 2 ans plus tôt. Le gouvernement ne s’attend pas de son côté à un “retour à la normale” avant 2022.
Déjà maintes fois reportées, les mesures visant à transformer l’Assurance chômage de fond en compte risquent donc bien de ne pas revoir le jour cette année.