Victime de nombreux stéréotypes, le métier de surveillant pénitentiaire souffre d’une image tronquée. Il s’agit pourtant d’une profession qui recrute et offre des perspectives de carrière. Nous nous sommes rendus au centre pénitentiaire de Fresnes pour savoir de quoi était fait le quotidien des surveillants.
“Je parle rarement de mon métier à l’extérieur, lance Myriam Robert, 1ère surveillante et formatrice au centre pénitentiaire de Fresnes (94). On pense que c’est inhumain.” La profession de surveillant pénitentiaire reste méconnue et suscite de nombreuses idées reçues. À la clé pourtant, des perspectives d’évolution dans un secteur qui recrute.
Les séries américaines en cause
Prison Break, Orange is the newblack, Oz… les séries télévisées autour de l’univers carcéral ne manquent pas. Au lieu de servir la cause des surveillants pénitentiaires, elles contribuent au contraire à véhiculer une image fictive de leur quotidien, les présentant comme des brutes dénuées de toute forme de compassion. “Nous souffrons d’un vrai manque de reconnaissance vis-à-vis de la population par rapport aux autres forces de sécurité publiques, raconte Myriam Robert. Nous nous en rendons notamment compte lorsque nous participons à des forums ou des salons.” La 1èresurveillante et formatrice au centre pénitentiaire de Fresnes confie d’ailleurs être restée évasive sur ses fonctions auprès de ses parents, lorsqu’elle s’est reconvertie dans l’univers carcéral.
“Dans les séries, les détenus mangent dans des réfectoires. Dans la réalité, ils prennent leur repas encellule où un auxiliaire d’étages leur distribue un plateau. Nous ne pourrions pas tous les réunir dans un seul et même endroit et les surveiller correctement, explique David Gallay, surveillant et formateur au centre pénitentiaire de Fresnes. Ils n’ont pas d’uniforme, l’administration pénitentiaire a beaucoup changé ! Nous ne sommes même pas armés, sauf si nous sommes en poste au mirador ou pour des missions d’escortes. C’est pour éviter que le détenu se saisisse de l’arme et la retourne contre nous. Nous disposons simplement d’un sifflet.” Une sensation désagréable de devoir se justifier en permanence assurent les deux collègues. Car la réalité est loin d’être aussi sombre. “Malheureusement, la presse parle des suicides lorsqu’il y en a, mais combien sont évités ?”, s’interroge Myriam Robert.
Le surveillant n’est pas l’ennemi du détenu
Pour eux, il est primordial que leurs interactions avec la population carcérale se déroulent dans un respect mutuel. “Ils ont besoin de nous. Nous les orientons, les conseillons. Certains ont besoin de parler et nous nous trouvons souvent au premier plan. Le métier tourne beaucoup autour de la relation humaine, mais il faut pouvoir garder des distances. Finalement, nous sommes plus à l’écoute que dans la discussion”, souligne Myriam Robert. David Gallay s’est parfois entendu dire que, faute de places, les détenus dormaient de temps à autres à même le sol. Une pratique qu’il dément formellement. “Fresnes est labellisée, ce qui garantit à l’arrivée du détenu une douche, un kit de couchage propre, un repas chaud ainsi que la possibilité de voir un médecin et/ ou un psychologue. Lorsqu’ils arrivent après 36 heures de garde-à-vue, ils rêvent d’une douche, ce que nous leur proposons en premier. Beaucoup de gens pensent que nous ne sommes pas humains, moi je trouve que c’est le contraire.” C’est pourquoi la profession nécessite de faire preuve de certaines qualités.
Faire face aux situations difficiles
“Les candidats à ce métier doivent être des personnes équilibrées, insiste Myriam Robert. Ils ne peuvent pas se permettre d’être faibles psychologiquement, mais au contraire bien dans leur tête. Il me semble également important de connaître ses limites, d’être ouvert.” D’ailleurs, lorsque certaines situations sont trop difficiles à gérer psychologiquement, elle recommande de ne pas hésiter une seconde avant de faire appel à des professionnels. “Des psychologues sont à disposition du personnel qui doit parfois faire face à des choses terribles, reconnaît la 1èresurveillante. Ces situations peuvent être difficiles à gérer personnellement si l’on n’est pas préparé. Certains détenus sont très fragiles.” Les deux collègues reconnaissent néanmoins avoir parfaitement été formés pour affronter des situations plus tendues. Et pour s’abstenir de tout a priori, Myriam Robert ne prend pas connaissance de la fiche pénale des détenus à leur arrivée. “C’est mon choix, et nous finissons toujours par apprendre pour quelles raisons ils sont là, mais le premier pas est passé de cette manière. Et même si l’affaire a été médiatisée, je m’interdis tout jugement afin de pouvoir travailler sereinement.”