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La justice prud’homale est inefficace, selon un rapport sénatorial

Alors que la Cour de cassation a validé le barème pour licenciement abusif utilisé par le conseil de prud’hommes, un rapport appelle à revoir le système même de la justice prud’homale, qu’il juge inefficace.

 

Article mis à jour le 17 juillet 2019

 
La Cour de cassation s’est prononcée, ce 17 juillet, sur le barème prud’homal pour licenciement abusif, fortement critiqué par les syndicats et de nombreux conseils de Prud’hommes : la haute juridiction estime qu’il est conforme aux accords internationaux.

 

Un barème jugé insuffisant

Depuis les ordonnances Macron de 2017, qui ont réformé le Code du travail, les indemnités prud’homales ont un plancher et un plafond en fonction de l’ancienneté du collaborateur. Elles sont limitées entre un et 20 mois de salaire brut. Mais certains conseils de Prud’hommes refusent d’appliquer ce barème, considérant qu’il ne répare pas le préjudice subi par le salarié.

Par exemple, début 2019, ceux de Lyon et Amiens ont estimé qu’il était contraire au droit international, et ont respectivement accordé à deux ex-salariés une indemnité égale à trois et un mois de salaire (au lieu d’un demi-mois) – en s’appuyant sur l’article 24 de la Charte sociale européenne du 3 mai 1996, qui prévoit une « indemnité adéquate » ou « une réparation appropriée » pour les salariés victimes d’un licenciement abusif.

De leur côté, les conseils de prud’hommes de Louviers (Eure) et Toulouse ont sollicité en avril dernier l’avis de la Cour de cassation pour savoir si le barème était conforme aux textes internationaux. Ils avancent l’article 10 de la convention 158 de l’Organisation internationale du travail (OIT) de 1982, disposant qu’en cas de licenciement injustifié les juges doivent « être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée ».

Lors d’une séance plénière de la Cour de cassation, le 8 juillet 2019, les avocats de salariés ont critiqué un barème « injuste, qui sécurise l’employeur fautif », et qui « dissuade le salarié de saisir la justice ». Et de mettre en avant la baisse « marquée » des contentieux aux prud’hommes – « jusqu’à -40 % dans certains conseils » en 2018, qui en serait la conséquence.

Depuis un an, plus d’une dizaine de CPH ont condamné des patrons à des indemnités supérieures. La Cour de cassation s’est donc prononcée sur le sujet, ce 17 juillet, infirmant ces décisions.

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Une justice prud’homale trop lente, selon un rapport

En parallèle, un rapport sénatorial dévoilé la veille, mardi 16 juillet, vise à “améliorer le fonctionnement de la justice prud’homale, dans l’intérêt du justiciable”. Constatant des  “difficultés récurrentes”, comme des délais de jugement élevés, des décisions souvent contestées (avec un taux d’appel très important), ainsi qu’un manque de conciliations, les sénateurs à l’origine de cette étude formulent 46 propositions, dont un certain nombre pourrait toucher les salariés attaquant leurs anciens patrons.

Parmi ces préconisations, on trouve l’idée de rendre la conciliation facultative, en proposant de confier à « un bureau d’orientation » la tâche de sélectionner les affaires pour lesquelles une méditation ou une conciliation pourraient être tentées, et celles à renvoyer directement devant un « bureau de jugement », qui serait présidé par un magistrat professionnel.

Le rapport conseille aussi de renforcer les moyens des CPH,  notamment en greffiers et juges départiteurs. Enfin, les sénateurs recommandent la mise en place d’une « obligation » de formation continue pour les conseillers prud’homaux, sous la responsabilité de l’École nationale de la magistrature – afin d’apporter à ces derniers, qui ne sont pas des professionnels du droit, une plus grande « crédibilité ». Les élus proposent aussi de leur faire porter la robe, et de changer le nom des conseils de prud’hommes en « tribunaux » de prud’hommes.

 
 

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