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Le salariat, un modèle révolu à l’ère du digital ?

Tribune – Le salariat, c’est LE modèle de référence qui définit le rapport social entre le salarié et l’employeur. Il repose essentiellement sur un principe de subordination : le salarié accepte de mettre à la disposition de son employeur sa capacité de travail et reçoit en contrepartie une rémunération de la part de ce dernier. Par Meysa Sy, juriste Tech chez Cassius Avocats.

 

Forgé par le code du travail, le salariat, c’est 93 % de la population active. C’est une force non négligeable pour l’économie du pays. C’est la garantie d’une stabilité professionnelle et financière pour les salariés. Pour les employeurs, c’est un levier de croissance incontestable.
Aujourd’hui, ce modèle est en proie à de nombreuses interrogations. En effet, de plus en plus de travailleurs décident de délaisser ce statut au profit d’une nouvelle forme de travail privilégiant l’indépendance à l’égard des entreprises : l’auto-entreprenariat. L’“uberisation” du travail prend forme sous l’impulsion d’un mouvement incoercible qu’est la révolution digitale.

 

La transformation du travail

Nous sommes témoins d’une transformation de la notion de travail au profit de nouvelles organisations qui bouleversent nos codes habituels. Les CDD et CDI (85 % des salariés français sont en CDI) se trouvent menacés par l’apparition de nouveaux types de collaborations par le biais des plate-formes collaboratives et de l’auto-entreprenariat. L’indépendance, l’aspiration à plus d’autonomie et de liberté ainsi que l’épanouissement professionnel font du salariat un modèle “has been”. Il faut dire que les nouvelles technologies font émerger de nouveaux comportements en totale rupture avec le traditionnel modèle que constitue le salariat. Les plate-formes collaboratives sont des accélérateurs de développement du statut d’auto-entreprenariat. Elles pullulent sur Internet et ont suscité un engouement sans commune mesure pour les utilisateurs. Uber, Blablacar ou Hopwork permettent à de nombreuses personnes de se passer d’un contrat de travail tout en s’assurant une rémunération confortable.
L’objectif de ces plateformes est de reprendre l’idée selon laquelle, notre société serait basée sur des principes d’ouverture, de collaboration, de partage et de confiance. Rendre la liberté aux personnes et l’autonomie qu’elles souhaitent sont un moyen d’atteindre un vrai épanouissement professionnel et personnel. La notion de travail perd tout son sens originel. Le “patron” laisse place au “collaborateur” avec au bout du compte, la mise en avant des intérêts individuels.
Ces sites permettent aux personnes qui le souhaitent d’exercer une activité professionnelle de façon indépendante. En dépit des manifestations qu’ils ont soulevé notamment chez les chauffeurs de taxi et les livreurs dans la restauration (Deliverro, Foodora…), ces plate-formes ont mis en lumière des possibilités jusque-là inexploitées par la population. L’auto-entreprenariat contribue à l’avènement d’une nouvelle vision du travail et donc d’une nouvelle organisation de son modèle.

 

Un modèle remis en question ?

Aux États-Unis, il y a aujourd’hui près de 54 millions de travailleurs “freelance” (soit près de 35 % des actifs du pays) et ce mouvement n’est pas près de s’arrêter. En France, nous assistons à une augmentation constante des travailleurs indépendants. Ils seraient 2,7 millions selon l’INSEE. La caractéristique du contrat de travail réside dans le fait qu’il permet notamment à l’employeur d’avoir le contrôle sur son salarié : un contrôle sur le temps de travail mais aussi sur la qualité de celui-ci. Le travailleur indépendant, lui, parvient à s’affranchir de tout contrôle sur son temps de travail. L’entreprise effectue alors uniquement un contrôle sur la qualité de la prestation commandée. L’autorité traditionnelle de l’employeur tend à disparaître avec ces nouvelles formes de collaboration émergentes. Aussi, l’apparition de ces nouveaux modèles a pour conséquence la dématérialisation de la relation de travail. Qu’ils soient salariés ou auto-entrepreneurs, les nouvelles technologies poussent vers plus de liberté, plus de flexibilité et plus d’autonomie dans l’exécution de la prestation de travail.
Il est vrai qu’aujourd’hui, il est possible de travailler avec un simple smartphone et à n’importe quel moment de la journée. Les plate-formes Internet sont souvent dotées d’outils technologiques rendant beaucoup aisée, et à certains égards, la relation de travail. Par ailleurs, le salariat basé sur le Code du travail présente de nombreuses difficultés que l’auto-entreprenariat permet de contourner. Pour certains, le droit du travail “paralyse” la relation contractuelle.
Néanmoins, force est de constater qu’à ce jour, le contrat de travail remporte toujours autant l’adhésion des employeurs face à l’auto-entreprenariat. Mais pour combien de temps ?

 

 

 

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