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L’ex-ministre de la Transition écologique et solidaire Élisabeth Borne, désormais ministre du Travail et de l’emploi, hérite de plusieurs chantiers difficiles liés à l’emploi, dont l’effondrement semble inéluctable face à la crise du Covid-19. À commencer par la réforme de l’assurance chômage et l’emploi des jeunes.
Élisabeth Borne, jusqu’ici ministre de la Transition écologique et solidaire, est devenue ce lundi 6 juillet, la nouvelle ministre du Travail, de l’emploi et de l’insertion. Elle succède à Muriel Pénicaud, dont elle hérite de plusieurs chantiers explosifs, liés à l’emploi.
Alors que des dossiers épineux comme les retraites ou la santé au travail devraient se rouvrir, l’ancienne dirigeante de la RATP devra faire face à une situation très particulière, suite à la crise du Covid-19. Alors que sa prédécesseure Muriel Pénicaud se croyait déjà proche du plein emploi, espérant atteindre les 7 % de chômage d’ici à 2022, la Banque de France s’attend désormais à un taux de chômage de 11,5 % d’ici mi-2021, avec une perte d’un million d’emplois en 2020.
Alors qu’une vague de plans sociaux promet notamment de s’abattre sur le pays après l’épidémie de coronavirus, Élisabeth Borne devra aller plus loin que le développement (désormais contrôlé) du chômage partiel.
Reprendre la réforme de l’assurance chômage
Le premier volet de la réforme de l’assurance chômage est intervenu en novembre 2019. La durée minimale de travail pour acquérir des droits est passée de 4 mois sur une période de référence de 28 mois, à 6 mois de travail au minimum sur 24 mois. La deuxième phase de ce chantier devait entrer en vigueur en avril. Mais face au coronavirus, le nouveau mode de calcul du montant de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) a été reporté à septembre.
Depuis juin, les syndicats demandent au gouvernement de revenir sur cette réforme et exigent son abandon, refusant que “les chômeurs se voient infliger la double peine de se retrouver privés d’emploi et de droits sociaux”. Muriel Pénicaud n’a pas varié son discours ces derniers mois : “la réforme se poursuivra”. Mais la ministre promettait dans le même temps d’annoncer un “assouplissement” des règles de l’assurance chômage d’ici fin juillet. Des concertations avec les organisations syndicales et patronales devaient avoir lieu ces jours-ci sur la question. Muriel Pénicaud ne fermait pas non plus la porte à l’abandon de la taxe de 10 euros sur les CDD d’usage (CDDU) ; des contrats courts utilisés dans des secteurs très touchés par la crise, comme la restauration ou l’événementiel.
À Élisabeth Borne d’aller, d’ici l’automne, soit dans le sens de sa prédécesseure, soit de changer totalement de cap. Mais face à un marché du travail déjà fortement secoué, ses marges de manœuvre risquent d’être limitées.
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Aider l’emploi des jeunes
Comment aider les jeunes, dont 700 000 se préparent à débarquer en septembre prochain sur un marché du travail sinistré ? Qu’ils soient diplômés ou non, les 18-25 ans sont les plus exposés au chômage, suite à la crise du coronavirus. Pour les aider, des mesures exceptionnelles ont été mises en place pour l’apprentissage, le 1er juillet dernier. Concrètement, il s’agit d’une aide pour les entreprises qui recruteront des apprentis entre juillet 2020 et mars 2021, s’élevant à 8000 euros pour les 18-30 ans.
Mais au-delà, le gouvernement prépare d’autres mesures, dans le cadre d’un “plan massif” qui devrait être détaillé avant le 14 juillet prochain, et qui devrait coûter un milliard d’euros. Première mesure annoncée : la création d’une aide à l’embauche des jeunes. Jusqu’ici, Bruno Le Maire (qui demeure ministre de l’Économie) et Muriel Pénicaud prévoyaient aussi d’amplifier un autre levier : la Garantie jeunes.
Élisabeth Borne aura aussi le choix d’aller plus loin, en suivant par exemple les préconisations de certains économistes, qui conseillent de développer les emplois aidés et le parcours emploi compétences (PEC), ou encore de créer un dispositif d’embauche des jeunes pour un an par les entreprises, “pris en charge entièrement” par l’État.
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Favoriser la reconversion des demandeurs d’emploi
Afin d’aider les demandeurs d’emploi qui viennent de perdre leur travail ou ceux qui ne parviennent à en retrouver un nouveau, Élisabeth Borne devrait aussi reprendre un chantier ouvert par Muriel Pénicaud : la formation professionnelle.
Dans les entreprises, l’idée serait de renforcer les outils existants permettant de se former pour se reconvertir plus tard, qu’il s’agisse du CPF (compte personnel de formation), du CPF de transition ou du plan d’investissement dans les compétences (PIC). Pour les demandeurs d’emploi, la ministre pourrait se pencher sur le dispositif du conseil en évolution professionnelle (CEP), qui permet déjà depuis janvier 2020 aux salariés démissionnaires de bénéficier gratuitement d’un accompagnement dans l’optique d’une reconversion, en parallèle de l’allocation chômage.
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Éviter les plans sociaux avec les accords de performance collectif
Malgré un dispositif de chômage partiel sans précédent, Élisabeth Borne devra finalement trouver une solution alternative pour éviter les faillites et les licenciements qui s’annoncent à la rentrée. Elle pourrait être tentée de prôner, auprès des entreprises et des partenaires sociaux, le recours à l’APC, ou accord de performance collective. Pour rappel, ce dispositif permet aux dirigeants d’aménager la durée du travail, mais aussi la rémunération, afin de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise ou “en vue de préserver ou de développer l’emploi”.
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